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    L’OxyContin, ce médicament décrié dans la série Netflix Painkiller, fait-il aussi des ravages en France ?
    Chaïma Tounsi-Chaïbdraa
    Chaïma Tounsi-Chaïbdraa
    -Journaliste streaming
    Elle avait attendu avec impatience l’arrivée de Netflix et s’était inscrite dans l’heure pour dévorer la première saison de Daredevil. Depuis, elle suit de près ce qui sort chaque semaine sur la plateforme pour se faire des soirées binge-watching et vous conseiller le meilleur des sorties streaming.

    En regardant la série Netflix Painkiller qui revient sur la crise des opiacés aux Etats-Unis, on peut être en droit de se demander si l’OxyContin a aussi fait des ravages chez nous.

    OxyContin. Purdue Pharma, la famille Sackler… si vous avez dévoré comme bon nombre d’abonnés Netflix la série Painkiller, alors ces mots vous sont familiers. Le dernier hit en date de la plateforme nous raconte la crise des opioïdes qui a frappé les Etats-Unis il y a plusieurs années et qui continue de faire des ravages aujourd’hui.

    Après avoir vu la série, il est tout à fait logique de se demander si l’Oxycontin a été commercialisé en France et si oui, comment notre pays a mis en place des mesures pour empêcher la même crise qu’Outre-atlantique.

    Painkiller
    Painkiller
    Sortie : 2023-08-10 | 45 min
    Série : Painkiller
    Avec Uzo Aduba, Matthew Broderick, Taylor Kitsch
    Presse
    3,1
    Spectateurs
    4,0
    Voir sur Netflix

    Une prise en charge réglementée

    L’OxyContin est un anti-inflammatoire puissant (au même titre que le fentanyl ou la morphine) qui permet de réduire la douleur physique. Dérivé de l’oxycodone, il est "indiqué dans le traitement des douleurs sévères qui ne peuvent être correctement traitées que par des analgésiques opioïdes forts ; en particulier dans les douleurs d’origine cancéreuse", peut-on lire sur la base de données publiques des médicaments.

    Oui, l’OxyContin est délivré en France, mais son utilisation est réglementée et strictement encadrée, comme nous l’explique l’ordre des pharmaciens : "Concernant les conditions de délivrances, il doit impérativement s'agir d'une ordonnance sécurisée [ordonnances au format papier qui répondent à des spécifications techniques précises ndlr] qui, hors cas particuliers, doit être présentée dans les 3 jours suivant sa date d'établissement. Par ailleurs, la durée du traitement pour une seule ordonnance ne peut dépasser 28 jours.

    Sur celle-ci doivent apparaître :

    • timbre de l'officine
    • numéro d'enregistrement à l'ordonnancier
    • date d'exécution
    • quantité délivrée en unités de prise

    Et lors de l'enregistrement, il faut impérativement renseigner :

    • nom et adresse du prescripteur
    • nom et adresse du patient
    • nom et adresse du porteur de l'ordonnance lorsque celui-ci n'est pas le malade et s'il est inconnu du pharmacien, les références d'une pièce justifiant son identité
    • date de délivrance
    • dénomination du médicament
    • quantité délivrée

    Enfin, pour des questions de sécurité, la copie de l'ordonnance doit être conservée pendant 3 ans."

    A noter que le médecin doit systématiquement informer son patient sur le traitement et sur son arrêt, et surveiller sa consommation pour prévenir le moindre risque.

    En France, la situation est différente pour plusieurs raisons comme l’explique l’ANSM (l’agence nationale de sécurité du médicament et de produits de santé), dans un rapport de 50 pages publié en février 2019 : elle "n’est pas la même, dans la mesure où les conditions de prescription, de délivrance, de prise en charge des traitements par antalgiques opioïdes et d’information auprès des professionnels de santé et du grand public sont différentes de celles des États-Unis".

    Comme l’illustre Painkiller, la société Purdue Pharma a engagé des vendeurs pour faire du porte à porte auprès des médecins afin de faire la promotion de l’Oxycontin et de leur offrir des petits cadeaux (des peluches au nom de l’entreprise par exemple). Une pratique interdite en France donc.

    Les vendeuses de Purdue Pharma dans Painkiller netflix
    Les vendeuses de Purdue Pharma dans Painkiller

    Une évolution inquiétante

    En mai dernier, la société française de pharmacologie et de thérapeutique publiait sur son site internet un article mettant en garde contre l’augmentation de l’utilisation de l’oxycodone dans la prise en charge de la douleur : “En France, son implication dans les décès toxiques par antalgiques a quadruplé entre 2013 et 2017. En 2017, si en France la morphine était toujours le premier antalgique opioïde de palier 3 utilisé, elle était suivie de près par l’oxycodone en forte augmentation (+738 % depuis 2006), à la fois en ville et à l’hôpital”.

    Plus dangereux que la morphine, pour le même résultat, l’oxycodone inquiète pour plusieurs raisons. Son action dopaminergique plus importante et durable que la morphine peut être associée à un profil plus "addictogène". Autrement dit, en se rapprochant de la dopamine, aussi connu comme la molécule du plaisir, l’oxycodone crée une plus forte dépendance qu’un autre opiacé.

    Un aspect justement soulevé dans la série, notamment dans cette scène hallucinante de l’épisode 1 dans laquelle Richard Sackler (Matthew Broderick) veut marketer son produit sur la notion de “fuir la douleur pour atteindre le plaisir”.

    Cet opioïde n’inquiète pas seulement la société française de pharmacologie et de thérapeutique mais aussi l’ANSM. Si leur étude convient d’une augmentation de l’utilisation des antalgiques en France, elle rappelle que cela s’inscrit dans “la politique d’amélioration de la prise en charge de la douleur de part, notamment, des plans ministériels de lutte contre la douleur ayant été mis en place depuis 1998”. Mais. L’agence pointe les dangers d'un mésusage et de son utilisation dans le cadre d’un traitement non-cancéreux qui doit être surveillé et qui continue à être surveillé.

    Les sources utiles :

    Fiche médicament : https://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/affichageDoc.php?specid=61200108&typedoc=R

    L'article de la société française de pharmacologie et de thérapeutique : https://sfpt-fr.org/pharmacofact-blog/1828-f012-l%E2%80%99augmentation-de-l%E2%80%99utilisation-de-l%E2%80%99oxycodone-dans-la-prise-en-charge-de-la-douleur

    Le rapport de l’ANSM sur la consommation des antalgiques opioïdes et leurs usages problématiques : https://ansm.sante.fr/actualites/antalgiques-opioides-lansm-publie-un-etat-des-lieux-de-la-consommation-en-france

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