Seul un grand homme pouvait rendre une telle noblesse à un monument du cinéma fantastique. Depuis sa première apparition au grand écran en 1933, le gorille géant en a fait du chemin à travers maintes adaptations plus ou moins réussies, cartoonesques parfois, pour ne pas dire ridicules. En 1986 déjà on sentait le renouveau, l’évolution graphique et l’émotion. En 2005 tout bascule avec l’ère de Peter Jackson, celui à qui l’on doit tant de chefs d’œuvre, dont l’adaptation du Seigneur des Anneaux de Tolkien. Ce dernier remake en date n’est pas seulement le meilleur, c’est aussi une prouesse cinématographique de 3h, sans aucun temps morts, mais plutôt un traitement minutieux des silences. Tout y est : l’aventure immersive à l’ancienne, dans les confins d’une terre sauvage et primitive, jusqu’à présent oubliée par l’Homme, l’action pure, le visuel, et l’émotion. Car il est important de souligner l’impacte de la motion capture sur le regard de Kong, la sincérité qu’il dégage, sa fierté et sa puissance démentielle. On retrouve derrière ce faciès intense et expressif un habitué des personnages virtuels, un certain Andy Serkis, connu pour son interprétation de Gollum et Caesar dans la planète des singes. Ces échanges de regards avec la belle Naomi Watts, actrice de music-hall pétillante, est un des points forts du film, les passages les plus chargés en émotion véritable. Cette complicité improbable qui se crée entre la belle et la bête, proche d’un syndrome de Stockholm, est tout à fait saisissante. Par son génie de l’esthétique, Jackson est parvenu à rendre chaque scène, chaque plan séquence, plus grandiose encore que le précédent, avec une créativité remarquable et un attachement certain pour l’œuvre originale. On retrouve en grande partie le scénario authentique, avec en prime une fantaisie propre à son auteur. Car s’il utilise à outrance les fonts verts pour sublimer la synthèse, il le fait à merveille, sans faux raccords ni faute de goût. Cette texture volontairement salie en mode super 8, ces décors sublimes du New York des années 30, ces couchers de soleil sur une nature encore vierge, ces combats incroyables entre Kong et les T-rex, sans oublier le clin d’œil réflectif à l’indignation et la cruauté de l’Homme face à la nature, l’enchainement remarquable et perpétuel du grand spectacle qui n’en fini jamais d’émouvoir et de surprendre ; tout cela n’est qu’une apothéose de génie et de respect pour un travail bien fait. Une maitrise technique sur tous les fronts qui vaut bien une reconnaissance privilégiée. Bienvenu au top 50 des plus grands chefs d’œuvre en tous genres. Incontournable. 5/5