13 juin 1928 / 23 mai 2015. Telle aura été l’espérance de vie d’un mathématicien hors normes, pas connu seulement pour sa fameuse "théorie des jeux" appelée "L’équilibre de Nash", mais aussi pour sa schizophrénie doublée de paranoïa, une maladie impitoyable dont il parviendra à vivre avec seulement 25 ans plus tard. Son travail, sa volonté, sa lutte, sa force ne peuvent qu’inspirer un immense respect envers cet homme d’exception à l’esprit d’exception. Pour cet homme d’exception, il fallait bien un acteur d’exception : Russell Crowe qui, pour moi, rentre définitivement dans la cour des grands acteurs avec ce rôle de composition. Qui aurait pensé que ce comédien aurait été capable de relever cet incroyable défi ? N’oublions pas qu’il nous a émerveillés à travers "Gladiator", qu’il nous a éblouis de son talent et de son charisme. Mais le rôle est fondamentalement différent et d’une toute autre époque. Ici, il prend les traits d’un jeune étudiant, dont la coiffure lui confère une agaçante tête de premier de la classe. Ses mimiques, sa démarche d’enfant qui fait parfois penser à celle que pouvait avoir Charlot le vagabond quand il était en proie à la tristesse, eh bien tout ça font le reste. Enfin presque. On doit compter aussi avec les bonnes prestations de Paul Bettany dans la peau de Charles, de Josh Lucas dans les traits de Hansen, et d’Ed Harris dans le rôle énigmatique de William Parcher. Ce n’est pas tout. Car les dialogues sont particulièrement bien construits, suffisamment évolués sans se perdre ni dans du vocabulaire inusité et donc pompeux bien qu’un tantinet soutenu, ni dans des théories mathématiciennes inaccessibles à la plupart d’entre nous. Pour cet homme d’exception, il fallait bien une femme d’exception. Et elle a été magnifiquement portée par une surprenante Jennifer Connelly, impressionnante de justesse et de présence à l’écran. D’ailleurs elle fut oscarisée. La prestation du couple nous laisse sans voix, nous émeut, nous tire des larmes d’émotion, portée il est vrai par une partition superbe de James Horner, et par la caméra intimiste de Ron Howard visiblement très inspiré, doublement oscarisé pour avoir signé le meilleur film et en tant que meilleur réalisateur. Les moments cruciaux comme les instants de réflexion sont bien aménagés, et c’est ce qui achève d’amener de la profondeur à ce film, sublimés par un potentiel photographique énorme. Une seule erreur s’est glissée dans le film : il n’existe pas de prix Nobel d’économie ou de sciences économiques. En fait, la Banque de Suède a institué un prix en économie en 1968, le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel, certes appelé communément "Prix Nobel d'économie", bien que n'étant pas formellement un prix Nobel décerné par l'Académie royale des sciences de Suède. On pardonnera aisément cette inexactitude, car le prix accordé à John Nash est bien réel en 1994, et le film est tellement… d’exception…