Héros des années 1980 plus communément appelées les années Reagan, Sylvester Stallone voit sa carrière marquer sérieusement le pas au début de la décennie suivante. La saga « Rocky » qui en est à son cinquième opus commence à s’essouffler tout comme la saga « Rambo ». Si ses films demeurent rentables, Stallone voit ses concurrents comme Jean-Claude Van Damme, Bruce Willis et autres Dolph Lundgren ou Steven Seagal rogner ses parts de marché. Il tente de se diversifier sans grand succès dans la comédie, genre dans lequel il ne montre pas les mêmes dispositions que son rival de toujours Arnold Schwarzenegger. En 1996 avec « Copland », se voyant proposer le rôle d’un policier municipal gravement diminué par un handicap (perte totale d’audition sur une oreille) lui interdisant de réaliser son rêve de gosse d’intégrer le NYPD (New York Police Department) après que Tom Hanks, John Travolta, Cary Sinise et Tom Cruise aient décliné l’offre, Stallone tente encore une fois de prouver qu’il n’est pas seulement bon à jouer les héros bodybuildés. Pour l’occasion il va prendre 18 kilos, mettant ses pas dans ceux de Robert de Niro qui en avait pris 27 pour interpréter Jack LaMotta dans « Raging Bull » (Martin Scorsese en 1980) et qui lui aussi figure au générique de « Copland » dans un rôle secondaire. Un pari risqué qui s’il sera plutôt salué par la critique ne lui fera pas retrouver les sommets du box-office dans les années qui suivront. James Mangold qui réalise le film vient tout juste de se faire remarquer avec « Heavy » son premier long métrage. Miramax, la société de production des frères Weinstein décide de s’impliquer dans son projet de bâtir un film policier prenant pour cadre sa ville natale dans la banlieue New-York connue pour être le lieu de résidence d’anciens et actuels policiers du NYPD. Le scénario écrit par James Mangold met l’accent sur
la corruption liée à la consanguinité inhérente à la situation mais aussi et surtout sur les conditions très favorables offertes par la mafia pour l’installation de la petite communauté qu’elle entend ainsi avoir à sa botte. Freddy Heflin (Sylvester Stallone), enfant du pays un peu dépressif évolue donc parmi tous ces agents qu’il admire avec l’espoir secret d’un jour pouvoir rejoindre leur confrérie même si souvent raillé, il n’ignore pas le mépris qu’il leur inspire. L’intrigue qui commence un peu confusément s’enroule autour d’une bavure que la même confrérie va s’évertuer à masquer
par l’intermédiaire du lieutenant Ray Donan (Harvey Keitel) celui qui traite directement avec les pontes de la mafia new yorkaise. Un inspecteur du bureau des affaires internes (Robert de Niro) va mettre son nez dans cette affaire. James Mangold qui sans doute grâce à l’entregent d’Harvey Weinstein dispose d’un casting de premier choix avec des acteurs tels Robert de Niro, Harvey Keitel, Ray Liotta et bien sûr Sylvester Stallone ayant tous accepté de baisser leur cachet au minimum requis, dirige subtilement cette distribution prestigieuse avec notamment un Harvey Keitel qui fait froid dans le dos. La corruption jamais franchement exposée dans toute sa dimension exsude pourtant tout au long du film, faisant ainsi de « Copland » un film très intrigant car particulièrement immersif. Les mœurs corrompues de cette communauté repliée sur elle-même s’immiscent de manière toxique jusque dans vie intime des couples devenus très instables. Mais celui que l’on n’attendait pas va venir remettre un peu d’ordre dans ce fricot peu ragoûtant. James Mangold montre une fois de plus que son talent peut le mener loin. Malheureusement comme beaucoup, il se laissera entraîner dans l’aventure de l’adaptation de comics ce qui ne l’empêchera toutefois pas de réaliser quelques films intéressants comme « Walk the Line » (2005) biopic très méritoire sur Johnny Cash, le remake de « 3h10 pour Yuma » (2007) ou encore « Le Mans 66 » (2019). Depuis une grosse quinzaine d’années de nombreux talents se sont un peu affadis à se perdre dans ces grosses productions un peu désincarnées qui n’ont d’autre but que divertir un jeune (pas toujours) public dont la capacité de réflexion n’est pratiquement pas sollicitée. À dessein ?