Le film débute en décembre 1895 au théâtre de la Renaissance où Sarah Bernhardt (Clémentine CÉLARIÉ), 51 ans, joue Mélissinde dans la pièce « La princesse lointaine » d’Edmond Rostand (Thomas SOLIVERES, 29 ans). La pièce est un four. Elle demande alors à l’écrivain de rencontrer l’acteur Constant Coquelin (Olivier GOURMET) et de lui écrire une pièce où il aura le rôle principal. Rostand lui propose, à la va vite, un titre « Cyrano de Bergerac », avant même de l’avoir écrite. Comme elle est refusée à la Comédie Française et que la pièce, « Thermidor » de Victorien Sardou au Théâtre de la Porte Saint-Martin est un four, Coquelin, 56 ans, n’a pas d’autre choix, en remplacement, que de la jouer rapidement, ayant loué le théâtre pour une certaine durée. Reste à Rostand de l’écrire… Par chance, ses rencontres récentes
(dans un café, avec son ami comédien, Léo Volny, amoureux d’une costumière et pour qui il écrit des lettres d’amour)
constituent autant de matériaux nourrissant la création de sa pièce.
Jeanne (Lucie BOUJENAH), la costumière, constitue sa muse, platonique, seul le désir comptant et non la réalisation de ce désir [ce qui lui permet d’être fidèle à sa femme, Rosemonde Gérard, 29 ans (Alice de LENCQUESEING), cherchant l’inspiration et non l’amour.
Une vraie réussite : un scénario bien construit, avec des rebondissements (qu’importe s’il s’éloigne de la réalité), des dialogues justes, du rythme (à la façon des pièces de Georges Feydeau, 35 ans, présent dans le film sous les traits d’Alexis MICHALIK), une caméra très mobile (plongées, tour circulaire sur scène) et qui se fait oublier, une belle reconstitution de Paris (en Tchéquie)
et avec même l’acte V (la mort de Cyrano au couvent où s’est retirée Roxane) tourné en extérieurs [cloître de l’abbaye Saint-Pierre de Moissac (82)].
C’est d’une part, une réflexion sur la création [comme le faisait « Shakespeare in love » (1998) de John Madden à propos de « Roméo et Juliette »] et d’autre part, un hommage au théâtre et aux comédiens. Le film se termine en rappelant que la première de la pièce, le 28 décembre 1897 a bénéficié de 40 rappels, qu’Edmond Rostand a obtenu la Légion d’honneur 3 jours plus tard (à 29 ans) et que la pièce a été jouée plus de 20 000 fois depuis sa création. Il convient de rester pendant le générique qui affiche en plus des extraits des différents comédiens ayant joué le rôle-titre : Constant Coquelin (1900), Pierre Magnier (1925), Claude Dauphin (1945), Daniel Sorano (1960), Jean Piat (1964), Jean Marais (1970), José Ferrer (1950, dans le film de Michaël Gordon), Jacques Weber (1983), Jean-Claude Drouot (1985), Michel Vuillermoz (2006) et Gérard Depardieu (1990, dans le film de Jean-Paul Rappeneau). Un bel exemple de qualité française, décriée en son temps par les cinéastes et critiques de la Nouvelle Vague. Cela change des films lents et longs, au scénario inconsistant, mal éclairés, mal cadrés et tournés en banlieue !