Il y a de nombreux grands classiques avec lesquels il est compliqué de sympathiser. En tant que fan de cinéma, nous ne sommes pas obligés de les apprécier, et c'est un point important à retenir. Il est toujours intéressant de les voir, mais rien, ni personne, ne doit vous forcer à les aimer. Pour ma part, il y a quelques grands films qui n'ont jamais réussi à me toucher, pour différentes raisons à chaque fois. Et dans ce lot, "Le Salaire de la Peur" est l'un des meilleurs exemples pour les illustrer. Sorti en 1953, le projet est un film extrêmement important pour le cinéma français, car il était l'une des plus grosses productions de cette époque. Mais personnellement, même si je lui reconnais des qualités, je n'ai pas apprécié le visionner. Réalisé par Henri-Georges Clouzot, le long-métrage nous plonge dans une ambiance extrêmement particulière, où l'ennui règne. Et je ne parle pas forcément de cela pour le rythme, mais bien plus par rapport à l'état d'esprit de nos personnages et leur situation. L'histoire part d'une idée assez intéressante et permettant d'explorer différentes thématiques, avec ce concept de la mission mortelle, mais qui paraît inespérée, pour des personnages bloqués dans une vie monotone et sans distraction. Se déroulant en Amérique centrale, le film traite donc de la situation de cette partie du monde à cette époque. Et sur le papier, il démontre bien l'envie de fuir que nos personnages ressentent, car ils sont prêts à risquer leur vie pour espérer s'en aller. Au niveau de l'esthétique, je n'ai pas grand-chose à lui reprocher, le réalisateur faisant dérouler son action au sein de décors crades, qu'il filme avec beaucoup de lenteur, pour y symboliser sa monotonie. Mais malheureusement, pour accentuer cette lenteur, il décide de prendre son temps pour nous la faire ressentir. Et c'est là que je commence à trouver des faiblesses à ce projet, car si je comprends l'intention, il est difficile de se sentir embarqué par ce dernier, quand celui-ci met près d'une heure avant de démarrer. Toute la première heure n'est qu'une mise en place pour l'univers, dans le but d'y montrer le quotidien barbant de nos héros. Et selon moi, c'est beaucoup trop long, car tout ce qui sera développé dans cette partie ne servira pas à grand-chose. Certes, on nous montre des conflits, de l'ennui et l'emprise des Américains du Nord sur la population, mais faire cela pendant une heure, ça a très rapidement tendance à m'ennuyer. J'aime les ambiances très lentes et qui prennent leur temps, mais il ne faut pas en abuser. Surtout que les héros, qui vivent cet ennui, n'ont rien de très passionnant à nous raconter. Le plus grand exemple de cela étant notre personnage principal, un héros antipathique au possible. On nous le montre comme un homme vraiment mauvais, et cela, pendant tout le long-métrage. Je peux l'accepter pour la base du scénario, mais j'ai du mal à y trouver de l'intérêt s'il ne change jamais et si cela n'apporte rien à la thématique globale du projet.
On essaie de nous faire croire qu'il change légèrement en fin de film, mais quand il écrase volontairement la jambe de son ami à la scène d'avant, j'ai bien du mal à trouver cela crédible.
Dotant que je me pose vraiment la question, est-ce que c'était nécessaire de le faire aussi méchant ? J'ai beau chercher, je ne comprends pas ce que cela amène à notre histoire, j'ai la sensation que cela ne dit rien. On aurait été face à un héros gentil, je ne suis pas sûr que les thèmes du film auraient été moins bien exploités. Cela dit, il est possible que je sois passé à côté de l'intérêt du personnage, je peux essayer de le croire. Mais globalement, cela n'enlève rien à ces actes, et la façon dont certains personnages passent l'éponge sur ces actions diminue énormément la crédibilité de ce récit. La façon dont Linda se montre extrêmement idiote face à lui m'a vraiment tendu, j'avais juste envie de la secouer pour lui dire de se réveiller. Par conséquent, avec un début bien trop long pour rien et un héros qui ne m'inspire pas grand-chose, comment ce film pouvait-il me plaire ? Pour le coup, la deuxième partie se montre un peu plus intéressante, en jouant sur du suspense et une tension constante. On joue sur la dangerosité de ce convoi, au travers de séquences vraiment bonnes, comme celle du virage à bord de falaise ou celle de la pierre. L'absence de musique accentue énormément la tension de ses scènes, et elles se montrent comme les meilleures du film. Mais encore une fois, je ne suis pas totalement emporté par celles-ci, n'ayant aucun attachement à nos personnages. À cause de cette distance, je n'ai jamais peur pour eux, et je ne ressens rien quand quelque chose de dramatique se déroule. Tout cela aboutissant à un final que je trouve extrêmement caricatural et trop rapidement bâclé. Dans l'ensemble, je ne nie donc pas les quelques qualités de ce long-métrage, qui sait utiliser son style pour amener une ambiance vraiment prenante par moments. Mais avec une écriture qui gâche son potentiel, et de très grosses lenteurs, le film n'est jamais très agréable à regarder. C'est un long-métrage bien trop lourd à visionner, qui aurait pu durer une heure de moins, que cela n'aurait pas été gênant pour exprimer tous les thèmes qu'il avait à aborder. Pour conclure, un classique que je n'apprécie pas vraiment.