Après les Golden Globes, je voulais vraiment voir ce "Spotlight" : un film qui traite d'un sujet sensible, porté par un casting d'exception. Nominé plusieurs fois aux Oscars, le film m'intéressa d'autant plus. Maintenant vu, je peux porter mon avis.
"Spotlight" est un bon film. Un très bon film même tant son sujet est parfaitement exploité. Cependant, sa seule force réside dans son scénario. Car oui, malgré des acteurs impeccables, le film ne brille pas totalement. Le récit est inspiré de faits réels, ce qui va susciter la polémique, d'où très certainement la forte impression aux cérémonies. Le thème de la pédophilie au sein de l'Eglise est un sujet très difficile à mettre en scène, et à exploiter convenablement. Cependant, Tom McCarthy ("The Visitor") réalise avec ce métrage-ci une œuvre intense et fascinante à suivre. L'enquête que mènent les journalistes du Boston Globe, est parfaitement construite. L'enjeu de départ prend une envergure de plus en plus grande au fur et à mesure que l'on avance dans l'histoire, et nous montre les différentes facettes du système juridique et catholique. Sans jamais tomber dans le cliché du genre, ou dans des révélations faciles, ce drame prenant tient sur une trame très bien scénarisée. Intelligent et jusqu'au-boutiste, "Spotlight" nous présente des personnes attachantes et d'une grande humanité face à ce scandale, dont la publication dans le journal fut plusieurs mois après les attentats des Tours Jumelles.
A maintes reprises devant cette fresque américaine dramatique, j'ai pensé au "Zodiac" de David Fincher : dans son enquête s'étalant sur plusieurs mois et rondement menée, mais aussi sur le visuel. La palette graphique est froide, glaçante et sans touche de couleurs démarquée. La réalisation est quant à elle bonne, mais manque cruellement d'inventivité dans ses plans. Le metteur en scène n'utilise principalement que des champs contre champs, parfois de très beaux plans séquences, mais majoritairement des plans fixes ; la caméra n'a pas d'enjeux visuels. Le style de Tom McCarthy n'est pas encore bien défini, il est très classique. Toutefois, la mise en scène est d'une grande efficacité et offre des séquences remarquables, grâce aussi à un montage bien orchestré. La musique est elle aussi simple, pas assez poussée. Howard Shore compose un thème principal certes très joli, mais qui manque de fulgurance.
Les acteurs incarnent quant à eux vraiment leurs personnages. Mark Ruffalo ("Foxcatcher") est splendide, il se donne à fond en un journaliste d'investigation dévoré par sa soif de vérité. Michael Keaton, qui fait un retour en force depuis "Birdman", est lui aussi très bon même s'il ne dégage pas la même compassion. Rachel McAdams ("Sherlock Holmes"), Liev Schreiber ("Ray Donovan"), Stanley Tucci ("Margin Call"), John Slattery ("Ant-Man"), Brian d'Arcy James ("Friends With Kids"), Billy Crudup ("Watchmen") et James Sheridan ("Agent X") les accompagnent et sont tout aussi convaincants. A vrai dire, mis à part Mark Ruffalo qui montre des fulgurances dans son jeu, chacune des performances est égale à une autre, sans pour autant être exceptionnelle (Rachel McAdams semble parfois effacée tant son rôle est maigre psychologiquement). En effet, les protagonistes sont intéressants mais ne dégagent pas d'émotions particulière à cause d'un caractère moral pas assez mis en avant. Le long-métrage ne repose que sur son propos, et cela est bien dommage pour l'ambition si grande qu'est de traité des cas de pédophilie.
Le metteur en scène n'a pas fait un travail des plus sensationnels sur la forme de son œuvre. C'est donc pourquoi, vaut mieux s'intéresser au fond qui est grandiose. L'exploitation est très convaincante, tout à fait crédible dans l'approche présentée par les journalistes. On ressent la rage de ces hommes, ainsi que le désespoir des autres face à cette longue et difficile enquête. "Spotlight" c'est un film à Oscars qui maitrise ses thématiques. Un film qui ne repose globalement que sur son histoire captivante, car il n'a rien de plus à apporter. Evitant le larmoyant, Tom McCarthy a réalisé un film toutefois nécessaire pour toucher une plus grande partie du public, critiquant et mettant ainsi en scène un sujet révoltant. La perversité de certains prêtres, et le nombre de ceux-ci étant grands, la lutte contre le système est palpitante et en finesse. Un film à regarder pour sa position dramatique.