La morale, la conscience, la générosité, le pardon... Les vrais, cependant. La moraline, la bien-pensance, l'aumône ritualisée et dédouanante, le pseudo oubli : des ersatz, des trompe-l'oeil, de la tartuferie... "Défense et Illustration" avec ce "Winter Sleep", du Turc, enfin palmé, Nuri Bilge Ceylan. Sous la neige, la nature sommeille, mais les hommes sont, eux, toujours en éveil, prêts pour, au mieux, la controverse, le plus souvent, les combats mesquins, la malveillance, la rancoeur et la jalousie, la haine même.... Le metteur en scène, qui est aussi le scénariste, avec son épouse Ebru (et encore le monteur et la producteur !) a su, en fin lettré et grand admirateur de l'écrivain, transposer l'univers tchékhovien de la Russie de la fin de l'époque tsariste à l'Anatolie contemporaine (spectaculaire Cappadoce, avec habitat si particulier). Scènes de la vie de campagne (le héros a hérité terres et maisons, patrimoine géré avec l'aide de son régisseur, Hidayet), scènes de la vie conjugale et familiale (Aydin, ex-comédien vieillissant, tient un petit hôtel à flanc de colline - pas d'enfants, mais une jeune épouse mélancolique, Nihal, et une soeur fantasque, Necla, qui se remet mal de son récent divorce)... Les dialogues sont passionnants, les interprètes parfaits, les prises de vue superbes et les 3 h 16 fort loin d'un pensum, qui passent comme un éclair, au fil de "disputes" d'un excellent niveau intellectuel. Mais la fin paraît quand même un peu rapide (eh oui..) et "plaquée", sans véritable soubassement, sur l'édifice général du film.. Moins élaboré aussi, moins captivant (globalement) que "Il était une fois en Anatolie"..