Quand j’étais allé voir "Une séparation", le précédent film d’Asghar Farhadi, je m’étais demandé si ce film aurait eu autant de succès s’il s’était passé en Occident et non en Iran. "Le passé", c’est presque la réponse à ma question. Comme "Une séparation", ce film est l’histoire... bah d’une séparation. Cette histoire est racontée de manière linéaire, s’efforçant de faire le plus authentique possible, ne s’intéressant à rien de particulier si ce n’est à saisir une « tranche de vie » avec le plus de sincérité possible. Dans le principe c’est couillu car au fond c’est bien maigre. Donc, bref, tout repose sur le talent du cinéaste à donner vie à ce corps bien frêle. Et c’est là que se trouve pour moi le problème, c’est que je trouve justement que la réalisation de Farhadi n’a rien de vraiment transcendal pour m’émerveiller devant cette histoire banale. C’est qu’en plus, à force de m’emmerder devant ses films, j’ai fini par trouver une façon simple de décrire ce style de réalisation finalement qui me lasse si vite tant il est basique. 1° je passe tous mes acteurs sous Xanax pour qu’ils parlent mollement et laissent trois secondes entre chaque phrase. 2° Je compose mes plans selon la grammaire la plus simpliste qui soit : plan d’ensemble si les personnages se rapprochent, champs-contrechamps s’ils s’opposent. 3° Les bruits d’ambiances sont la clef de l’authenticité : on en fout partoooout et touuuuuut le temps. 4° Faire reposer le scénario sur une vérité humaine fondamentale selon Farhadi : les hommes sont des êtres raisonnables capables de paroles réconciliatrices (surtout les Iraniens qui, eux, savent résoudre les soucis comme on répare les lavabos), alors que les femmes sont toutes des hystériques, certes attachantes, mais forcément source d’emmerdes. Désolé, mais sur moi ce type de recettes simplistes ne marche pas du tout. Je trouve ça répétitif, pas très inventif, souvent caricatural, mais surtout paradoxalement je trouve ça fort artificiel. Alors après Farhadi a cette science du silence qui fait qu’on peut être séduit par la liberté qui nous est laissé de combler les trous. Why not... C’est vrai que j’avoue que ça a marché à quelques moments : le mot était juste, adapté à la situation posée, le cadre sobre. J’en étais même arrivé à vouloir l’aimer ce film... Seulement voilà... Je ne comprendrais toujours pas qu’on passe plus de deux heures à raconter une histoire qui se raconte en une ; je ne comprendrais toujours pas ce refus d’enrichir l’histoire par des péripéties, et surtout je ne comprendrais jamais cette phobie de l’artifice narratif qui pourtant permet d’éviter ces introductions interminables et ces situations qui perdent en densité sur la longueur. Alors du coup, contrairement à "Une séparation", je peux encore comprendre qu’on trouve quelque-chose de touchant dans ce "Passé", mais quand c’est à ce point dilué et souillé par des choix aussi peu inventifs, moi ça me laisse quand même sur ma faim.