Je n'attendais pas spécialement ce film, même si bon, ça me démangeait de ne pas l'avoir ayant aimé tous les autres films (que j'ai vu) du réalisateur. Avec peut-être, avec le recul une petite préférence pour Punch Drunk Love, parce que c'est le plus simple, le plus beau. Après There will be blood ça reste assez énorme dans sa volonté de faire du grand cinéma et Magnolia il y a quand même une belle brochette de personnages intéressants. Je placerai The Master dans la même lignée que There will be blood. On sent qu'après les inspirations d'Altman et des frères Coen il a envie de faire du grand cinéma moins repompé mais avec tout ce bagage que pourrait comporter l’appellation d'origine contrôle : classique du cinéma. Et autant dire que j'en ai rien à foutre.
Perso je vais au cinéma pour voir des oeuvres informes, dissonantes, quelque chose qui te prend au tripes malgré ses défauts parce qu'avant tout ça vit, ça grouille. Ou bien parce que c'est vrai et pur. Voir cette promesse autoproclamée (et par les professionnels de la profession) de grand cinéma ça ne m'intéresse pas des masses.
Mais bon j'ai aimé les autres films, pourquoi n'aimerai-je pas celui là ?
Oui Prout. Déjà le film a commencé en m’énervant, Phoenix, j'adore ce mec, mais il joue mal. Ok, c'est un rôle à oscar, le mec il joue un mec un peu perturbé et il va tenter de le faire sans être grossier ou caricatural. Mais finalement je vois un acteur qui tente de faire et qui n'est en rien naturel. Tout ça me semble travaillé et retravaillé. Déjà je ne vois rien de vrai sans son personnage puisque je ne vois qu'un acteur essayant de le jouer à la perfection. C'est d'un artificiel. Alors au fur et à mesure je m'y suis habitué, mais les moments où Phoenix est juste c'est lorsqu'il est statique et qu'il ferme sa gueule, parce que le vrai acteur qu'il est peut enfin s'exprimer. Il tombe dans les mêmes pièges où peut tomber parfois Sean Penn ou bien Daniel Day Lewis (hâte de voir comment il s'en sort dans Lincoln). On a des grands acteurs qui parfois pour la performance, pour se dire je vais jouer ça, vont cabotiner, mais du coup ça ne marche pas. C'est réellement dur d'y croire.
Et puis dès le début on va en rajouter des caisses sur la sexualité du héros, le test de Rorschach c'était pas la peine hein, on avait compris dès le début. Subtilité zéro.
D'ailleurs le seul moment du film avec un peu de subtilité c'est lorsque la fille d'Hoffman vient et touche l'épaule de Phoenix le tout de manière assez discrète.
L'autre souci du film c'est que c'est incroyablement vide et vain. Autant There will be blood racontait quelque chose, autant là, je cherche encore.
Et pourtant moi les sectes, les trucs comme ça, j'aime. Et Anderson a beau tenter de le nier, je pense qu'il s'est bien inspiré de la scientologie (et ce n'est pas un reproche, je trouve ça intéressant).
Le problème c'est que tout ceci est froid, clinique et vide de sentiments et d'émotions. Je n'ai à aucun moment ressenti quelque chose pour un des personnages, les seuls commentaires qui me sont venus c'est ah c'est une belle photo là, ah joli plan. On est dans de l'exubérance formelle qui se voudrait au service d'un hypothétique fond. Je pense que certains vont s'amuser à réfléchir à ce que dit le film, tout retourner, mais à la vision du film j'ai l'impression que rien n'est limpide.
Après je trouve qu'Hoffman a le bon rôle, car il sait jouer et ce genre de personnage particulièrement. Du coup il est dans son élément et est finalement plus crédible que Phoenix et son petit numéro d'acteur modèle. J'ai envie de retrouver Phoenix chez Gray, parce que là j'ai mal pour lui.
Ce film me laisse la sale impression d'avoir vu une installation d'art contemporain où l'auteur a voulu dire pleins de choses mais on ne voit pas grand chose.
Je pense que si Anderson veut devenir un grand cinéaste il doit abandonner ses idées de faire du Kubrick ou autre et venir à quelque chose de plus intime de moins grandiloquent, de moins artificiel et finalement de faire plus du cinéma que de la peinture (ou de la photo animée).
Et pour la gestion des flash back nous ne sommes pas dans la ligne rouge non plus, je sais pas, j'ai l'impression qu'ils veulent nous montrer un truc beau mais qui a du sens, seulement ce n'est ni l'un ni l'autre.
Après je ne peux pas dire que je me suis emmerdé, ou que ça soit nul, mais c'est une promesse ratée et pas mal de vide. J'aurai préféré un truc plus couillu mais aussi plus bancal histoire qu'on sente que a été vécu et que ça n'ait pas cette forme informe justement de poupée de cire botoxée.
Ah et revoir Laura Dern ça m'a fait mal, elle a pas super bien vieilli la pauvre.
Et je sors donc de la salle avec ce goût amer sur la bouche de : j'ai perdu mon temps, même si c'était pas nul, ça ne raconte rien, ça ne parle pas de grand chose non plus (et pourtant ça voudrait).
Un film clinique et sans émotions. Vide.