Considéré comme le chef-d’œuvre d'Antonioni, "Blow-up" est une expérience cinéphilique sensorielle et inclassable. On comprend même sans aucun problème pourquoi David Lynch dit l'adorer. Avec un regard contemplatif sur ce qu'il filme, le célèbre réalisateur italien entoure sa pellicule d'un climat pesant, d'une ambiance mystérieuse à souhait, le tout rythmé par de bruyants silences. Une œuvre culte car maudite, Antonioni n'ayant pu tourner quelques scènes présentes dans le scénario dont la scène centrale de l'intrigue, faute de moyens financiers et de temps, problèmes causés par des brouilles avec la production. Le cinéaste récompensé par la Palme d'Or cannoise en 67 a donc du tout repenser lors du montage de ses prises de vues, et faire preuve d'astuce et d'habileté afin d'aboutir à un résultat qui ne serait pas chaotique, mais qui a certainement rajouter au côté énigmatique. Cette mise en abyme d'un jeune artiste londonien tourmenté par ce qu'il découvre au cœur même de ses propres clichés est une déclaration d'amour emprunte de philosophie à la photographie, la peinture, la comédie, l'art en général. Le personnage de ce photographe frimeur, fougueux et branché, qui découvre sur ses photos ce que ses yeux n'ont pas vu, est d'ailleurs l'un des grands attraits du film. En effet, David Hemmings livre une prestation habitée, alors que ses partenaires de jeu sont un gros bémol. On peut d'ailleurs voir Jane Birkin, ici au tout début de sa carrière d'actrice, apparaître au générique. Avant-gardiste et terriblement moderne pour l'époque, donc forcément kitsch aujourd'hui, « Blow-Up » souffre justement de ce côté très austère et hyper-intellectuel, de son tempo lent et sourd, mais réussit bizarrement à nous hypnotiser, alors qu'il faut bien le dire, il ne si passe pas grand chose. Les dialogues sont rares, le suspense inexistant, et les questions soulevées ne se voient apportées aucun élément de réponse. Si l'on s'ennuie parfois, faute à un scénario trop léger, on est tout de même happé par la mise en scène d'une précision métronomique, sobre et épurée, au visuel lumineux et élégant. A l'image de la scène finale et cette partie de tennis jouée par un cours de mime, un film vraiment étrange, parfois plat, mais d'une surprenante beauté.
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