Il fallait du courage pour faire ce film, au moins autant que pour faire le livre qui en est à l'origine. La mafia, stylisée par Scorsese, Coppola, De Palma et Meirelles, est ici ancrée dans une toute autre réalité. Adieu, maisons luxueuses, bonjour cités insalubres. Adieu clubs-restaurants classieux, bonjour boîtes de striptease pourries. Adieu l'Amérique, bonjour l'Italie. L'Italie?? Nous parlons bien d'un pays présent au G8, considéré comme un grand de ce monde? On se croirait ici en plain Kosovo! La guerre civile qui s'engage, et qui n'épargne ni mères, ni enfants, ressemble à une intifada armée au coeur de l'Europe. Gomorra est salutaire car il montre le revers de l'image de la Camorra : personnages idiots, rêvant d'être le prochain Tony Montana, spirale infernale, jeux assassins : la vie humaine n'a aucune valeur. Tout se passe dans la crasse, l'illettrisme, la bêtise. Et, constat amer du film, ce n'est pas prêt de s'arrêter. Tant qu'il y aura des hommes...