Si on prend ce film pour ce qu'il est, à savoir une adaptation de comics, un film d'anticipation avec Stallone, des flingues et quelques bolides, et qu'on est soi-même fan du genre, alors on peut apprécier ce métrage, qui pour moi est culte.
Malgré des costumes et motos caricaturales (mais fidèles au comics), l'univers est très bien posé, voir même innovant. Les effets spéciaux sont plus que corrects, parfois même très bons (pas tous hein). La réalisation est maîtrisée et de façon générale, on a une teinte à la fois colorée et clipée (sans aucun excès) qui crédibilise même les quelques effets spéciaux vieillissants.
Stallone est dans son rôle, lui-même caricatural (là encore, comme le personnage du comics), les méchants sont très méchants et les flingues sont très gros. L'objectif est évident : il s'agit d'une critique du "tout sécuritaire" et d'une Amérique fascinée par la violence. Ici, la réponse est une dictature de la justice. Très moderne, et généreux, un cocktail explosif justifié par un univers crédible. Un mélange de MadMax, New York 97 et Robocop, le tout dopé au manga d'anticipation. J'avoue coupablement que j'ai adoré ! C'est savoureux et complet.
Il y a une chose qu'on ne peut pas retiré à ce Judge Dredd, c'est l'effort de production : ce n'est pas un film de fainéants, covido-netflixé, où on cherche à aller vite, un semblant de scénario justifiant le spectacle.
Ici, vous allez vivre le film ! Ça commence en grande pompe : explosions, fusillades de bon goût et autres répliques cultes (évitez la version canadienne, c'est trèèèès important, vous devez reconnaître la voix française de Stallone, ou voir la version originale bien sûr).
Ça enchaîne directement sur le personnage, l'univers, le déroulement historique de la dystopie (qui est original, grâce au comics), description des institutions, de leurs travers, culte de la loi, les enjeux, présentation des gentils, des méchants (tous bien joués, que des grands acteurs). Le spectacle est véritablement mis en scène, sans raccourci.
Boum : ça repart sur le
déclin
du personnage principal, larmichettes,
case prison
, on
sort
de la mégacité, visite du
désert apocalyptique
, nouveaux méchants, baston, religion, nouveaux flingues, héroïsme, drame, humour (très peu)...
Bim : on
revient dans
la mégacité, coup de théâtre (crédible et bien ficelé), encore un nouveau méchant, le boss de fin (très méchant mais attachant, on le plaint, on s'identifie).
Déjà, tout roule, de nombreux blockbusters s'arrêteraient là, le torse bombé de fierté, à compter les entrées et le bénef, mais ici non : nouvelles armes, cyborg de guerre, complot génétique, dilemne quasi-œdipien, nouveau drame, nouvelles explosions, combat au sommet...
Allez je me lance : Armand Assante est excellent et ses répliques dans la scène où il casse la statue sont shakespeariennes. On a glissé de l'amusante caricature SF (mais déjà très politique) au théâtre assumé, génial !
Je crois même que dans la version originale, Armand Assante grogne comme un loup, sans ouvrir la bouche. Un vrai bon acteur celui-là, peut-être la vraie star du film.
Film complet donc, dans son genre j'entends. D'ailleurs dans cet exact même genre, de nombreux films ont fait moins bien mais ont injustement moins souffert de la critique (New York 97 et ses décors bon marché, Demolition Man et son univers hâtif...).
Je pense prétentieusement avoir l'explication : Stallone étant utilisé à plein emploi, le film, où plutôt le personnage de Stallone, paraît immédiatement très caricatural, et déconnecte les spectateurs peu rôdés à l'exercice, ou n'ayant pas compris l'objectif. Ce n'est pas du tout de la faute de l'acteur, qui a clairement fait le taf, peut-être malgré lui.
Un autre souci est que la critique politique arrive trop vite, sans pincette. C'est un film "de gauche", si vous votez à droite, vous vous sentirez visé dès les premières minutes. Difficile ainsi, de faire communion dans les salles.
Autrement : régalez-vous !
PS : il y a un autre Judge Dredd beaucoup plus récent, et loin d'être mauvais, qui fait un bel hommage au premier en ne reprenant pas du tout la même histoire, voire même en se positionnant à contre-pied. Dans le premier film les déplacements sont nombreux, dans le second on est presque en huis-clos. Dans le premier film on voit le visage du héros, dans le second jamais (dans le respect du comics). Dans le premier film c'est la génétique et les robots, dans le second la drogue et la télékinésie.
Malgré les critiques, je suis persuadé que le Judge Dredd de Stallone reste un bel exemple de ce que le cinéma peut faire, et que je ne suis pas le seul à le penser.