Dans l'odyssée cinématographique que représente "Thor" de Kenneth Branagh, le spectateur se trouve tiraillé entre deux mondes : l'un, empreint d'une mythologie nordique éblouissante et l'autre, ancré dans la réalité terrestre, un peu plus terne. Le film brille par moments, notamment grâce à l'esthétique somptueuse d'Asgard et aux performances charismatiques de Chris Hemsworth et Tom Hiddleston, incarnant respectivement Thor et Loki. Ces moments captivent, offrant une vision spectaculaire des dieux et de leurs querelles, tantôt divines, tantôt tragiquement humaines.
Cependant, l'éclat de ces scènes est souvent terni par le contraste abrupt lors du passage à la Terre, où l'intrigue semble perdre de son élan. Natalie Portman et Stellan Skarsgård, malgré leurs talents indéniables, sont confinés dans des rôles qui ne leur permettent pas de briller pleinement, réduits à de simples figures dans l'ombre du Dieu du Tonnerre. Le film peine ainsi à maintenir un équilibre cohérent entre ses aspirations épiques et les exigences d'une narration terrestre plus intimiste.
L'approche de Branagh, oscillant entre drame shakespearien et blockbuster hollywoodien, confère au film une certaine noblesse mais aussi une hétérogénéité qui peut dérouter. La musique de Patrick Doyle, majestueuse, accompagne magnifiquement les moments les plus grandioses, sans toutefois parvenir à unifier les diverses tonalités du film.
Le scénario, co-écrit par Ashley Miller, Zack Stentz et Don Payne, offre des moments de brillance, surtout dans la dynamique complexe entre Thor, Loki et leur père Odin. Ces interactions familiales sont le cœur battant du film, pleines de potentiel dramatique et émotionnel. Cependant, le récit global souffre d'une certaine prévisibilité et d'un manque d'approfondissement dans l'exploration de ses thèmes, comme l'exil, la rédemption et la fraternité.
"Thor" se distingue néanmoins par ses ambitions visuelles, avec des effets spéciaux et une direction artistique qui emmènent le spectateur dans un voyage esthétique remarquable. La conception d'Asgard, le royaume des dieux, est un véritable régal pour les yeux, illustrant le potentiel d'immersion du cinéma dans des mondes fantastiques.
En somme, "Thor" est une œuvre de contrastes, où l'éclat des dieux se mêle à la poussière de la Terre, où la grandeur mythologique côtoie les trivialités humaines. Ce mélange, bien que parfois discordant, crée une expérience cinématographique qui, malgré ses imperfections, détient son propre charme. Le film, tel un marteau imparfaitement forgé, possède à la fois la force d'attraction des légendes et le poids de ses contraintes terrestres.