Lors de la sortie de La Haine, j’étais allée voir le film, qui m’avait rendue vénère. Vénère des injustices commises, de la violence arbitraire, des préjugés, du racisme, de l’ostracisme sociétal dont sont victimes les habitants des cités, construites en périphérie, à la marge, cités dans la cité comme le mitard est une prison dans la prison.
Je viens de revoir la version restaurée 4K qui m’a rendue plus vénère encore, 30 ans et un nouveau siècle plus tard. Vénère de constater que ce film est plus que jamais actuel. C'est pas possible, je me fais remarquer, qu’une telle histoire demeure intemporelle.
Car rien n’a changé ces 30 dernières années. Jusqu’ici, rien n’a changé et rien ne va si bien. Mathieu Kassovitz avait expliqué à l’époque vouloir provoquer une prise de conscience, que respect et responsabilité s’installent entre policiers et habitants des cités. Jusqu’ici, ça a foiré. Les policiers se sont endurcis et les cités enflammées, sur fond d'un trafic de drogue toujours plus puissant (on est loin des boulettes de shit).
Les bavures font toujours la Une des journaux. Aujourd’hui en plus, les situations sont récupérées, selon qu’on se situe très à droite ou très à gauche et éloigné des partis historiques de gouvernement, histoire d'envenimer les débats.
Bien sûr, le film traite de violences policières et du manque de perspectives dans les cités, même si beaucoup d’associations se sont créées pour offrir des envolées sociales ou artistiques. Cependant, 30 ans plus tard, je m’interroge : hier comme aujourd’hui, que font ces jeunes à zoner, entre banlieues en Paname, au lieu d’étudier ? Le film se trompe de cible, il n'aborde que les conséquences, mais en amont, plutôt que l'Intérieur, ne serait-ce pas plutôt l'Éducation nationale et son rôle inclusif qui serait le ministère défaillant ?