Qui ne se souvient pas de la prestation de Tom Hanks dans "Philadelphia" ? Je ne pense pas me tromper lorsque je réponds personne, hormis ceux qui ne connaissent pas ce film. Car "Philadelphia" est un incontournable de la filmographie de Tom Hanks, avec un rôle qui le propulse parmi les acteurs les plus talentueux de sa génération, voire du monde. Un rôle qui lui rapporte son premier Oscar de meilleur acteur. Sa prestation est inoubliable, tellement fantastique que j’ai pris plaisir à revoir ce film. "Philadelphia" est un film qui lance un pavé dans la mare, en dénonçant l'homophobie d'une part, et d'autre part l’exclusion des malades du S.I.D.A. (acronyme de Syndrome d'ImmunoDéficience Acquise) , une maladie qui est le nouveau fléau pandémique né à la toute fin des années 70. Une nouvelle maladie mortelle inconnue qui a poussé des gens mal informés ou pas du tout informés à rejeter les malades comme des pestiférés, allant jusqu’à faire de la discrimination. Devant l’ampleur du phénomène, même si "Philadelphia" n’est pas le premier film à parler de cette terrible maladie, il est tout de même la première œuvre à réunir des acteurs célèbres pour aborder le thème de façon directe. Tout en apportant des réponses au spectateur sur les modes de contamination, "Philadelphia" informe sur l’évolution de la maladie, même si le thème très précis porte sur le procès de la discrimination. D’un côté nous avons Tom Hanks dans son premier rôle stratosphérique, de l’autre nous avons Denzel Washington qui a fraîchement percé au début des années 90 avec notamment "Ricochet" puis "Malcolm X". Alors que Tom Hanks n’hésite pas à perdre de 10 à 15 kilos pour montrer les ravages du virus, Denzel Washington interprète bien cette aversion envers les malades, et l’œil du réalisateur y est pour quelque chose. Il pose sa caméra sur la gestuelle de Tom Hanks, capture ce qu’il saisit, avant de revenir sur le visage de Denzel Washington dont les silences suffisent à témoigner l’envie de dire "écoutez, évitez de toucher à tout s’il vous plait", et recommence ce genre de séquence à plusieurs reprises. Et puis il y a Antonio Banderas, ce bel étalon ibère, dont le jeu ici pourrait être qualifié de piètre, mal à l'aise dans le rôle du compagnon condamné. Je dis simplement qu’il joue très bien en fait, car il retranscrit à merveille le désarroi, la compassion, et le sentiment d’impuissance devant une fin que tout le monde sait inéluctable. Car en 1993, aucun traitement efficace ne permettait de battre définitivement la maladie, pas plus qu’aujourd’hui d’ailleurs. Seule la trithérapie, apparue bien plus tard, a permis de limiter les dégâts, voire de stopper la progression de la maladie, sans pour autant la vaincre. Le sujet est donc ambitieux, ambitieux de par le désir de toucher un public aussi large que possible, et on peut dire que les producteurs ont réussi quand on connait l’immense succès qu’a rencontré "Philadelphia". Ce succès, on le doit notamment à la performance des acteurs, mais aussi au réalisateur à qui on doit "Le silence des agneaux", mais n’oublions pas non plus le compositeur Howard Shore qui signe là une bien jolie partition venant appuyer efficacement chacun des points clés. Aujourd’hui, on pourrait presque dire que le film comporte quelques clichés par rapport à la sensiblerie, mais les producteurs ont voulu un film fort pour marquer les esprits, et je pense qu’ils ont effectivement contribué (du moins en partie) au changement des mentalités. "Philadelphia" est donc un film utile, et le sera encore et encore pour tout nouveau fléau sanitaire de ce genre. D’ailleurs, sur LE tube de Bruce Springsteen qu'est "Streets of Philadelphia" (oscarisé en tant que meilleure chanson), ce chef-d’œuvre débute par une succession de saynètes de vie tout à fait normale, en total contraste avec ce qui va suivre, nous montrant ainsi qu’il faut profiter de la vie qui nous est offerte tant qu’elle est là, avant que la maladie, et par extension bien d’autres choses, ne viennent tout gâcher. Regardez et vous verrez un grand moment, une grande leçon d’humanité.