Ridley Scott est un grand réalisateur, et, comme tout grand réalisateur, il ne s’est jamais contenté de rester dans un genre précis : qu’il s’agisse de science-fiction ("Alien", "Blade Runner"), de films historiques ("Les Duellistes", "1492"), de thrillers ("Traquée", "Black Rain"), de drame ("Lame de Fond"), de road movie ("Thelma et Louise"), d’heroïc fantasy ("Legend") ou de péplum ("Gladiator"), Scott a toujours tenté de nouvelles expériences en réussissant à chaque fois à livrer un spectacle exceptionnel. Aujourd’hui, il s’attaque au film de guerre…mais Scott ne fait jamais les choses normalement : au lieu de choisir un grand conflit ou une célèbre bataille, il décide de choisir un évènement tragique qui a eu lieu en 1993 dans la ville de Mogadiscio lors de la guerre civile en Somalie où, lors d’une intervention visant à capturer des lieutenants du général Aidid, deux hélicoptères américains se sont écrasés en plein centre de la ville, laissant ainsi les occupants des appareils à la merci de milliers de miliciens totalement hostiles. Et pour retranscrire un tel évènement, Scott a mis les bouchés doubles : avec pas moins d’une dizaine d’hélicoptères et autant de véhicules blindés, notre ami joue la carte du réalisme à 150% !! Aucun véhicule virtuel fait en CGI dégueux ne se pointe en plein milieu de l’écran. Ensuite, les scènes de batailles ont reçu une attention toute particulière : très bien filmée de façon dynamique et stressante, l’action nous prend aux tripes et nous fait ressentir cette impression d’être piégé que pouvaient ressentir les soldats lors des faits. Là aussi le réalisme est de mise avec le jeu des acteurs bluffant (il parait que tous les acteurs qui jouaient des soldats ont été entraînés par de vrais militaires afin d’être le plus proche de la réalité possible) et aussi le son : les balles sifflent lourdement, les explosions sont assourdissantes et les cris des miliciens sont terrifiants ! Bien entendu, Scott nous filme tout ça avec sa virtuosité habituelle, nous livrant de grands moments épiques lors des combats, et nous dévoilant de très beaux plans larges exposant de superbes décors naturels (le film fut tourné au Maroc…oui pas en Somalie : le pays étant toujours dangereux, cela aurait été plus que difficile !!). D’ailleurs l’une des meilleures séquences du film est lorsque la mission débute et que Scott filme les hélicos en plein vol : alternant les plans rapprochés sur les appareils et les vues du décor naturels, aucun son n’intervient (pas de bruit de rotors ou de palmes, aucun dialogue radio…que dalle, nada), on entend que la sublime bande originale assez mélancolique. Il s’agit d’un moment étrangement paisible alors qu’il s’agit d’une opération militaire…une sorte d’allégorie du calme avant la tempête quand on sait ce qui va arriver par la suite. Un grand moment de cinéma !! Justement, parlons de la musique : Hans Zimmer nous propose encore un score magnifique qui est sublimé par les chants de Lisa Gerrard. Le duo réitère donc une bonne collaboration comme ils l’avaient fait sur "Gladiator" (…de Ridley Scott aussi tient : y’a pas de fumée sans feu !!). La B.O. est donc très bonne et mérite d’être dans toute collection de fan de bandes originales de films (ce que j’ai fait !!) Côté casting, y’a rien à dire : déjà Scott est un très bon directeur d’acteurs, et les acteurs eux-mêmes sont totalement impliqués dans le récit…et puis quel casting sans déconner, ça donne des frissons : Ewan McGregor, Jason Isaacs, Tom Sizemore, William Fichtner, Josh Hartnett, Eric Bana, Sam Shepard, Zeljko Ivanek, Orlando Bloom….que du bon ! Je vais terminer sur ce qui fait de "La Chute du Faucon Noir" un très bon film de guerre : vous ne serez absolument pas agressé par un patriotisme exacerbé, comme c’est souvent le cas dans les films de guerre américains, non Scott a préféré se concentrer sur ce qui a réellement poussé les soldats à risquer leur vie au sein de Mogadiscio pour récupérer leurs confrères : la solidarité entre soldats. Oui, ici c’est cette espèce de fraternité qui lie ces gars qui sont loin de chez eux au milieu d’une lutte qui les dépassent. D’ailleurs Scott a fait en sorte de sublimer au maximum cette solidarité en nous exposant en début de films les petites tensions existantes entre les différentes factions de l’armée US (Delta Forces, Rangers et Navy Seals) : chacune chambrant les autres. Mais par la suite, quand il s’agit de sauver ceux qui se sont crashés, il n’y a plus de factions qui tienne : ils sont tous soldats, tous frères….et on ne laisse pas ses frères dans la merde. Et je ne vous cache pas qu’on est plus touché par un humain voulant sauver un autre humain que par des patriotes qui meurent pour leur drapeau !
Voilà, "La Chute du Faucon Noir" est un très bon film de guerre qui ne vous laissera pas indifférent : on en ressort marqué, débordant de compassion pour ces courageux soldats qui sont morts lors de cette infernale journée. Sans conteste l’un des meilleurs films de Ridley Scott…quel dommage qu’il n’est pas remporté l’oscar du meilleur film et du meilleur réalisateur en 1992 (une honte !!!)