De quoi ça parle ?
Céline et Mathieu, couple de trentenaires agriculteurs, ont attendu pendant cinq depuis leur première demande d'adoption. Céline, stérile, la quarantaine approchant, se rend compte que le compte à rebours s’accélère à l'approche de la quarantaine. Mais l'assistante sociale n’a qu’une option à leur soumettre : l’adoption d’un enfant polyhandicapé.
Emplie de désespoir, Céline s’en prend violemment à elle. Avant de partir, sa stagiaire compatissante leur glisse les coordonnées de l'un de ses amis, Darius. Celui-ci a eu recours à une autre solution avec son conjoint Julien : la GPA (Gestation Pour Autrui). Céline est clairement réticente à cette idée, mais Mathieu va la convaincre d’aller au moins le rencontrer pour échanger à ce sujet...
Qu'est-ce qu'elle a ma famille, mercredi 9 janvier à 21h10 sur France 2
C'est avec qui ?
Pour incarner le couple formé par Céline et Mathieu, Sofia Essaïdi (La Promesse, Kepler(s)) donne la réplique à Malik Zidi (Vers la bataille, Nox). Face à eux, Benjamin Siksou (La Vie d'Adèle) et Roby Schinasi (La Vengeance aux yeux clairs) interprètent Darius et Julien, le couple qui va les mettre sur la voie de la GPA.
Un parcours du combattant vers la parentalité qui va leur faire croiser la route de deux familles canadiennes, jouées par Jennie-Anne Walker (Hero Corp), Florian Hutter, Eleonore Lamothe et Philippe Touzel. Leurs parents respectifs sont quant à eux incarnés par Patrick d'Assumçao (Paris Police 1900), Guilaine Londez (Benedetta) et Christiane Millet (Le Code), tandis que Bruno Sanches (HPI, L'Ecole de la vie) joue le frère de Céline.
Ça vaut le coup d'oeil ?
Première fiction française à aborder le sujet de la gestation pour autrui, Qu'est-ce qu'elle a ma famille ? est librement adaptée du récit de l'expérience personnelle de l'animateur et producteur de télévision Marc-Olivier Fogiel, publié aux éditions Grasset en 2018, qui a eu recours à ce procédé pour la naissance de ses deux filles.
Transposé en unitaire de 90 minutes pour France 2 par Marie Deshaires, Catherine Touzet et Hélène Angel (La Fin de l'été), qui signe également la réalisation, le sujet prend une plus grande ampleur, nourri de nombreux témoignages variés sur ce parcours qui prête à controverse en France où la législation sur la gestation pour autrui n'est toujours pas un sujet.
Et ce malgré l'avancée des débats dans le cadre de la révision de la loi bioéthique au sujet de l'ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée) pour toutes les femmes en septembre 2021.
En montrant un couple d'agriculteurs bien loin des stéréotypes du couple bobo parisien, face à un couple homosexuel citadin, le téléfilm ne veut pas seulement casser les clichés par souci de diversité de représentation : en effet, une grande majorité des couples hétérosexuels qui ont recours à la GPA viennent de toute la France et sont parfois contraints de s'endetter lourdement.
Partant de cette réalité, Qu'est-ce qu'elle a ma famille ? brosse le portrait de deux couples unis, portés par un amour mutuel solide mais aussi marqué par les doutes, les épreuves et le temps qui passe, et un entourage qui, parfois, les rejette.
Stérile, Céline fait face à l'incompréhension cruelle de sa mère lorsqu'elle lui annonce leur intention de se rendre au Canada pour rencontrer une femme porteuse. Darius, quant à lui, n'a plus de contact avec son père depuis son coming-out.
Epuisés par la longueur et l'échec des procédures d'adoption françaises, Céline, Mathieu, Darius et Julien se lancent dans l'inconnu outre-Manche en allant à la rencontre de deux femmes, elles-mêmes déjà mères, prêtes à les aider à devenir parents. Une aventure qui va les rapprocher et créer un lien indestructible.
Sans tomber dans le militantisme, le téléfilm aborde avec beaucoup d'humanité toutes les questions que l'on peut se poser sur ce procédé. Il n'évite pas les aspérités et les points d'accroche : que se passe-t-il si la femme porteuse change d'avis ? Quelle est la conséquence de cette grossesse pour son conjoint, ses enfants ? Peut-on garder un lien avec son parent biologique ? Enfin, que signifie faire famille autrement que par les liens du sang ?
Mais en mettant l'amour au centre du récit, les scénaristes parviennent à composer un angle d'approche sensible et juste, qui permet de confronter tous les points de vue sans jugement de valeurs - à commencer par celui des principales intéressées, ces femmes porteuses (et non "mère porteuses", refusant d'être étiquetées dans ce rôle) qui choisissent de disposer de leur corps comme elles le souhaitent pour le mettre au service d'autrui.
L'émotion qui affleure petit à petit tout au long du téléfilm réside également dans la puissance de ses interprètes, totalement investis dans leurs rôles. Sofia Essaïdi prouve à nouveau après La Promesse qu'elle est une grande actrice dramatique, et le lien que son personnage crée avec Darius, joué par un Benjamin Siksou à fleur de peau, se révèle particulièrement touchant. Sa mère, incarnée avec brio par Guilaine Londez, est tout aussi bouleversante dans ses préjugés qui viennent entraver son amour filial.
Voir ces êtres écorchés par la vie apprenndre à s'aimer en fondant leur propre famille dans une société qui ne le leur permettait pas, est peut-être la meilleure des réponses possibles à cet enjeu contemporain qui prête encore à controverse aujourd'hui en France.