Les Femmes et l’assassin sur Netflix : un documentaire passionnant sur la traque de Guy Georges
Emilie Semiramoth
Emilie Semiramoth
Cheffe du pôle streaming, elle a été biberonnée aux séries et au cinéma d'auteur. Elle ne cache pas son penchant pour la pop culture dans toutes ses excentricités. De la bromance entre Spock et Kirk dans Star Trek aux désillusions de Mulholland Drive de Lynch, elle ignore les frontières des genres.

Disponible sur Netflix, ce film documentaire – réalisé par Mona Achache et Patricia Tourancheau – revient sur la traque de Guy Georges. On vous dit pourquoi ça vaut le coup d’œil.

De quoi ça parle ?

Dans les années 90 à Paris, une commissaire de police et la mère de la victime d'un meurtre traquent un tueur en série pour qu'il soit jugé.

Les Femmes et l’assassin, un film de Mona Achache et Patricia Tourancheau avec Anne Gautier, Martine Monteil, Solange Doumic, Frédérique Pons et Patricia Tourancheau.

Une histoire de femmes

Ça démarre très fort avec le témoignage d’une mère qui a perdu sa fille. Anne Gautier est la mère d’Hélène Frinking, assassinée en juillet 1995 en rentrant d’une soirée. L’enquête piétine et Anne Gautier décide d’investiguer de son côté. N’en déplaise à Martine Monteil, la première femme à la tête de la brigade criminelle, qui est sur le dossier.

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D’autres femmes meurent assassinées dans des circonstances similaires dans les semaines qui suivent. L’enquête n’avance toujours pas. Martine Monteil enrage. Et l’affaire commence à faire parler d’elle dans les médias. La France a peur : un tueur s’en prend à des jeunes femmes dans l’Est de Paris.

Ce tueur, c’est Guy Georges mais Les Femmes et l’assassin n’est pas un film qui a vocation à dresser son portrait de tueur en série et de marquer une quelconque forme de fascination morbide pour le "tueur de l’Est parisien". C’est un film de femmes. Réalisé par Mona Achache et Patricia Tourancheau. Produit par Angélique Sansonnetti et Elodie Polo Ackermann. Avec des témoignages de femmes.

Il n’est pas le héros. Ce sont des femmes qui sont les héroïnes de ce documentaire.

"L’angle, celui de donner le point de vue des femmes, c’est une trouvaille collective. C’est grâce à Mona Achache, aux deux productrices et moi. Revisiter cette affaire avec le regard des quatre femmes – je n’étais pas prévue au départ – c’est donner un autre point de vue. Les hommes ne sont pas exclus pour autant !" explique Patricia Tourancheau, co-réalisatrice du film et l’une de ses protagonistes.

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"Mais c’est une affaire de femmes. Ce ne sont que des jeunes femmes qui ont été tuées. Battantes, pleines de vie, pleines d’énergie, hyper insérées dans la société avec des bons métiers, la joie de vivre, qui n’ont pas peur de rentrer chez elles la nuit. Et on a décidé de raconter cette histoire par des femmes battantes, énergiques, plus âgées mais qui ont un peu le profil des victimes dans le caractère."

C’est ce mode de narration qui donne toute sa puissance au film. "D’ailleurs, Martine Monteil dit à un moment : « Quelque part, ces filles, on avait envie de les venger. » On l’a vu comme un juste retour des choses par rapport à un mec comme Guy Georges." poursuit Patricia Tourancheau.

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Une mise en scène saisissante

En plus de sa casquette de co-réalisatrice, Patricia Tourancheau – fait rare dans un documentaire – est aussi l’une des cinq protagonistes du film. Convaincue par ses productrices, elle témoigne elle aussi. Logique puisque Patricia Tourancheau a suivi l’affaire et le procès à l’époque pour Libération.

Le film prend une autre dimension – beaucoup plus troublante et fascinante – dans sa deuxième partie qui se concentre plus précisément sur Solange Doumic, l’avocate de Pascale Escarfail qui était la première victime de Guy Georges, Frédérique Pons qui défendait l’accusé avec Alex Ursulet, et Patricia Tourancheau.

Elles se retrouvent toutes les trois dans la même salle d’audience, aux Assises, qui a vu se dérouler le procès de Guy Georges vingt ans plus tôt. "C’est venu de conversations avec Mona Achache où je lui racontais ce moment hallucinant des aveux de Guy Georges en mimant le geste (ce moment où il lève la main comme s’il tenait un couteau, ndlr)."

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Mais lors du procès, c’est Solange Doumic qui mime cet acte et réussit à confondre Guy Georges. "On l’a décidé avant et Solange nous l’a rejoué. C’était assez naturel pour elle et Frédérique Pons de le faire." Et la scène glace le sang, tout comme celle où Frédérique Pons revit sa plaidoirie. "C’est une avocate chevronnée, qui a plaidé beaucoup d’affaires. Elle rejoue sa plaidoirie et elle est au bord des larmes."

Dans cette scène de reconstitution, la mémoire du corps ressurgit presque malgré les intervenantes. Le passé et ces moments chargés d’émotion s’imposent à elles d’une façon stupéfiante. Après le piège tendu par Solange Doumic à Guy Georges en levant sa main comme on brandit un couteau, la caméra de Mona Achache se tourne vers Frédérique Pons. "Là, c’est tout à fait naturellement qu’elle rejoue et se retourne vers Guy Georges alors que le box est vide !"

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On l’aura compris, Les Femmes et l’assassin n’est pas un énième documentaire sensationnaliste sur le premier tueur en série français. "Il y a un moment où il faut laisser des traces de ce genre d’affaires. Notre but, c’était de la transmettre à travers la voix des femmes, à destination des jeunes – le public de Netflix – d’un public étranger qui ne connaît pas forcément cette histoire. C’est une affaire française, parisienne mais qui a une dimension internationale."

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