10 ans après la fin de Lost, le co-créateur Damon Lindelof, qui s'était peu exprimé sur la série depuis, vient de faire des révélations inédites au site Collider qui permettent de mieux comprendre certaines errances scénaristiques qui lui avaient été durement reprochées à l'époque, à lui et son acolyte Carlton Cuse.
Jusqu'ici, ce que nous savions c'est que les deux scénaristes et producteurs avaient réussi à négocier une fin programmée pour la série au terme de la saison 6, alors qu'ils travaillaient sur la saison 3. Un pacte avec la chaîne ABC d'un nouveau genre, qui en a inspiré d'autres par la suite. Ce que l'on ne savait pas, c'est toutes les étapes par lesquelles ils étaient passés avant d'arriver là.
En réalité, Lindelof et Cuse souhaitaient arrêter la série à l'issue de la saison 3, estimant que c'est le temps dont ils avaient besoin pour répondre à toutes les questions et mystères de départ. Il raconte : "Nous voulions donner certaines réponses à la fin de la saison 1, d'autres à la fin de la saison 2 et ensuite arrêter la série à la fin de la saison 3. C'est ce que l'on a proposé à la chaîne dès le départ, mais ils ne voulaient rien entendre. Ils nous disaient : 'Vous comprenez à quel point c'est difficile de rassembler un public derrière une série ? Et que le public l'aime autant ? Pourquoi vouloir tout arrêter si vite ? On n'arrête pas des séries que les gens continuent de regarder'". Le contexte de l'époque était bien différent d'aujourd'hui.
Ils ont dû abandonner cette idée un temps mais au terme de la saison 2, ils ont voulu retenter le coup. En vain. "Ni eux ni nous n'avons cédé, alors nous avons accepté de reconduire notre contrat pour une saison supplémentaire, avec dans l'idée que nous passerions le flambeau à d'autres scénaristes ensuite (...) nous avions des noms en tête."
Pour eux, l'avenir de la série était limitée à cause des flashbacks : "On ne pouvait pas en produire à l'infini. On n'allait pas montrer Jack en pleine auto-destruction à trois reprises, ou Charlie retombait dans la drogue encore et encore, ou Kate toujours en cavale. Ce qui fonctionne sur un ou deux épisodes, comme une origin story, n'est plus valable par la suite (...) Nous pouvions bien sûr nous intéresser à de nouveaux personnages, ce que nous avons fait, mais le public était surtout attaché aux originaux. On sentait venir les problèmes, mais la chaîne n'était pas d'accord avec nous."
Vers 10 saisons ?!
Après une saison 3 dont la diffusion avait été coupée en deux, le network est revenu vers les showrunners en leur proposant d'arrêter la série au terme de... la saison 10 ! "Le président d'ABC est venu nous dire qu'ils nous avaient entendu et qu'ils étaient d'accord pour mettre un terme à la série. Alors je me suis précipité pour les remercier, en leur disant que c'était ce qu'il y avait de mieux pour elle ! Mais là, il m'a annoncé que ce serait au bout de 10 saisons ! Ce qui n'avait aucun sens. Nous étions au milieu de la saison 3 à ce moment-là. Combien de séries dramatiques durent aussi longtemps que 10 saisons ?"
Lindelof et Cuse étaient toutefois prêts à poursuivre avec une saison 4 puisque l'idée que des personnages quittent l'île leur était déjà venue : "Nous savions qu'un certain nombre d'entre eux allaient réussir à partir, qu'ils allaient alors beaucoup souffrir loin de l'île et finalement décider d'y retourner dans le final (...) Mais là, ils nous ont dit okay pour aller non pas jusqu'à la saison 10 mais à la saison 9... (rires) Finalement, on a réussi à négocier 6 saisons, avec un peu moins d'épisodes pour nous permettre d'avoir plus de temps entre chaque saison afin de plannifier la suivante. Il y a eu la grève des scénaristes en saison 4 qui a un peu bousculé les choses, mais pour tout ce qui a suivi, le plan prévu a été à peu près respecté. Non pas que l'on a réussi tout ce que l'on a entrepris, mais en tout cas on a suivi notre plan."
Beaucoup de séries aujourd'hui doivent une fière chandelle à Lost et ses têtes pensantes, comme This Is Us par exemple ou The Good Place, dont les fins ont pu être plannifiées à l'avance, sans la même réticence de la part de leur chaîne.
