C'est quoi, le syndrome d'Asperger ?
Le syndrome d'Asperger doit son nom au psychiatre autrichien Hans Asperger, qui a décrit la notion de « psychopathie autistique », dont découle la définition du syndrome par Lorna Wing proposée en 1981. Il désigne un trouble du spectre autistique, qu'on retrouve sous l'abréviation TSA, et se caractérise par des difficultés significatives dans les interactions sociales, avec des intérêts et des comportements restreints et stéréotypés.
En revanche, le langage et le développement cognitif de l'individu souffrant du syndrome d'Asperger, appelé aussi parfois "Aspie", sont préservés par rapport aux autres TSA et ils manifestent souvent une mémoire exceptionnelle et des capacités supérieures à la moyenne dans leurs domaines d'expertise. En outre, le syndrome d'Asperger n'est pas considéré comme une maladie mentale.
Si l'on a généralement tendance à penser que le syndrome d’Asperger touche davantage les hommes que les femmes, c'est certainement à tort. Cela reste difficile à quantifier, mais l'on considère aujourd’hui que les femmes sont très probablement sous-diagnostiquées, en raison notamment de leur capacité à masquer délibérément leurs difficultés dans les interactions sociales. En conséquence, à la télévision ou au cinéma, on remarque que beaucoup plus de personnages atteints du syndrome d’Asperger sont des personnages masculins.
Asperger dans les séries
Le syndrome d'Asperger est souvent utilisé comme un ressort narratif, dans des séries policières ou médicales, pour brosser des personnages socialement inadaptés mais brillants, qui vont avoir un rôle majeur dans la résolution d'enquêtes par exemple. Il est aussi utilisé comme un ressort dans les comédies, où l'intelligence hors norme du personnage contraste violemment avec son inadaptabilité sociale et donnant lieu à des situations ou à des dialogues comiques.
Star Trek - Monsieur Spock
Le personnage de Spock, joué par Leonard Nimoy dans la série Star Trek de 1966, a souvent été comparé à un porteur du syndrome d'Asperger : sa façon de parler très clinique, son attitude avec les autres membres de l'équipage qui le trouvent souvent malpoli et méprisant... Son héritage vulcain le pousse vers la raison et la logique et lui-même considère que les émotions bien réelles qu'il ressent sont dues à son héritage humain, et les perçoit comme une faiblesse. Cela donne souvent lieu à des conversations très drôles où on lui reproche son manque d'empathie et où il remercie son interlocuteur, pensant qu'il s'agit d'un compliment. En revoyant la série, on se rend d'ailleurs compte à quel point Spock a inspiré le personnage de Sheldon dans The Big Bang Theory, dont on parlera un peu plus loin.
Bones - Temperance Brennan
Un détachement extrême et une forte difficulté à appréhender ses propres émotions et à les exprimer sont des éléments que l'on retrouve dans la personnalité de l'héroïne de la série policière Bones, Temperance Brennan, interprétée par Emily Deschanel pendant douze saisons et inspirée des romans de Kathy Reichs. Brennan, rebaptisée Bones par son partenaire Booth, est une anthropologue judiciaire brillante, souvent trop franche et parfois brusque, qui a souvent du mal à comprendre des choses évidentes pour les autres. Ce décalage est souvent symbolisé par la réplique "I don't know what that means" ("Je ne vois pas ce que ça veut dire"), qui participe également au charme du personnage. Bien que le syndrome d'Asperger ne soit jamais mentionné dans la série pour définir Bones, le créateur Hart Hanson a indiqué s'être inspiré d'un ami "Aspie" pour écrire le personnage.
Dr House - Gregory House
L'irrascible mais clairvoyant Gregory House, qui donne son nom à la série médicale Dr House et campé de 2004 à 2012 par Hugh Laurie, présente un certain nombre de caractéristiques proches du syndrome d'Asperger. Dans l'épisode 4 de la saison 3, « Dans les yeux », son ami Wilson suggère par ailleurs qu'il doit très certainement en être atteint, du fait de sa difficulté à accepter les règles sociales, du manque d'intérêt pour son apparence vestimentaire ou encore de son besoin d'entretenir des habitudes et une certaine stabilité dans son entourage. Dans ce même épisode, il explique qu'il jalouse un patient souffrant d'un trouble autistique sévère car cela lui permet de renoncer aux conventions sociales qu'on n'a de cesse de lui imposer.
The Bridge - Sonya Cross
Sonya Cross, l'héroïne de la série The Bridge incarnée par Diane Kruger, a le syndrome d'Asperger : elle possède une énorme capacité à se concentrer et perçoit souvent les choses sous un angle différent des autres. Les producteurs du show l'ont confirmé et Alex Plank, spécialiste du syndrome d'Asperger qui en est lui-même atteint, est intervenu comme conseiller au sein de l'équipe de production. Les auteurs de la série originale suédo-danoise, Bron, ont expliqué qu'ils n'avaient pas souhaité que ce soit dit clairement, car cela les aurait obligé à suivre exactement les caractéristiques du diagnostic.
Esprits criminels - Spencer Reid
Dans la série policière Esprits Criminels, Spencer Reid présente de nombreux traits correspondant au syndrome d'Asperger : doté d'un QI exceptionnel de 187, il est mal à l'aise quand il s'agit d'entretenir les discussions les plus banales, mais beaucoup plus en confiance pour évoquer des sujets qu'il maîtrise ou qui le stimulent intellectuellement. Souvent, cela l'amène à digresser ou à s'étendre de manière exagérée sur certaines questions. Dans un épisode au début de la série, un criminel a remarqué son trouble autistique et plus tard, il s'est fortement attaché à un jeune garçon autiste dont les parents avaient été enlevés. Le comédien Matthew Grey Gubler, qui a prêté ses traits au personnage pendant les quinze saisons de la série, a confirmé que Reid avait effectivement le syndrome d'Asperger et était probablement atteint d'une schizophrénie mineure.
Sherlock - Sherlock Holmes
Enquêteur hors pair dôté d'un esprit de déduction proche du génie, le Sherlock Holmes version BBC campé par Benedict Cumberbatch dans les années 2010 est en revanche totalement dépourvu d'empathie. Son fidèle associé et ami, le docteur Watson (Martin Freeman), qui se considère pourtant comme son ami, est le premier à en faire les frais. Possédant une vie intérieure très riche et se jouant des conventions, il est directement défini comme Asperger dans la série lors d'une conversation entre Watson et Lestrade (Rupert Graves). Orgueilleux et asocial, Sherlock pousse son trait de génie jusque dans ses extrêmes et ne vit que pour la satisfaction intellectuelle que lui apporte la résolution d'une enquête. Jusqu'à ce les conséquences entraînent de la souffrance pour ses proches, notamment à l'issue d'un duel au sommet avec son ennemi juré, Moriarty, dans l'épisode "The Reichenbach Fall" (saison 2.)
Community - Abed
Dans la série Community créé par Dan Harmon en 2009, c'est le personnage d'Abed (incarné par Danny Pudi) qui possède des caractéristiques pouvant s'apparenter au syndrome d'Asperger. Etudiant passionné par le cinéma et les séries, il ne parvient à exprimer ses émotions qu'à travers des imitations ou des références directes à la pop culture, qui sont également un moyen pour lui de réussir à entretenir des interactions sociales en reproduisant ce qu'il a vu dans ses films préférés. Ainsi, dans un épisode de la saison 2 où un homme l'accoste dans un bar en lui parlant de la série Farscape dont il est fan, il fait durer la conversation malgré les signes évidents de drague de la part de l'individu, qu'il choisit volontairement d'ignorer car parler de Farscape le passionne. En cela, Abed illustre parfaitement la notion d'intérêts spécifiques pour les autistes Asperger, qui font partie de leur fonctionnement et tendent à prendre énormément de place dans leur quotidien.
The Big Bang Theory - Sheldon Cooper
Comme cité plus haut, le commandant Spock de Stark Trek a indéniablement servi d'inspiration pour le personnage de Sheldon Cooper joué par Jim Parsons dans la sitcom The Big Bang Theory, diffusée de 2007 à 2019. Génie arrogant, Sheldon agace fréquemment ses amis et son colocataire Leonard par son étalage de savoir, son caractère obsessionnel et son profond manque de tact qui le rendent inapte aux conventions sociales. Sa petite amie, Amy (Mayim Bialik) souffre également de son désintérêt pour le contact physique et les démonstrations d'affection. Pour autant, le personnage de Sheldon n'est pas asexuel; il a simplement besoin de créer un lien fort avec Amy avant de passer ce cap !
Good Doctor - Shaun Murphy
Dans la série médicale Good Doctor lancée en 2017, Freddie Highmore incarne un jeune chirurgien fraîchement diplômé et atteint du syndrome d'Asperger qui intègre un hôpital prestigieux. Si ces compétences et son don auprès des patients lui valent l'admiration de certains collègues, il éprouve cependant des difficultés à s'intégrer à l'équipe à son arrivée. Good Doctor se démarque, outre sa représentation de premier plan d'un personnage autiste, par la manière dont elle donne au public des clefs de compréhension pour mieux appréhender le fonctionnement d'une personne autiste. Une démarche qui se rapproche de celle de la série Atypical sur Netflix, qui dépeint le quotidien d'un garçon autiste de dix-huit ans. En suivant les problématiques banales rencontrées par les garçons de son âge à travers le prisme du spectre autistique que doivent prendre en considération ses proches, on se familiarise avec la manière d'appréhender les comportements neuro-atypiques.
Astrid et Raphaëlle : vers une représentation plus réaliste des Asperger ?
En France, il faut attendre Astrid et Raphaëlle en 2019 pour avoir une représentation de l'autisme à la télévision. Et une fois n'est pas coutume, il s'agit d'un personnage féminin. Dans cette série policière, la commandante Raphaëlle Coste (Lola Dewaere) fait la rencontre d'Astrid Nieslen (Sara Mortensen), une archiviste au don d'observation particulièrement aigu et passionnée par la résolution de casses-tête. Déclarée autiste Asperger depuis l'enfance, Astrid illustre les difficultés d'adaptation sociale dont peuvent souffrir les "Aspie", tout en soulignant le besoin crucial de rituels et de repères solides pour pouvoir avancer (horaires fixes, ordre particulier pour effectuer une tâche, besoin de planifier les choses à l'avance), mais surtout, à travers sa complicité naissance avec Raphaëlle, du grand besoin de bienveillance de la part de son entourage.
Une représentation fidèle et juste de l'autisme qui a été saluée suite à la diffusion du pilote de la série, et s'inscrit dans une évolution progressive des stéréotypes de représentation qui permettront, peut-être ,de mieux sensibiliser le public autour de cet atypisme neurologique.
Retrouvez la saison 1 d'Astrid et Raphaëlle en replay sur la plateforme gratuite France.TV :