20 ans après avoir marqué les esprits des téléspectateurs, la série culte Caméra Café revient pour un épisode spécial Caméra Café : 20 ans déjà.
Pour l’occasion, Bruno Solo et Yvan Le Bolloc'h, les interprètes des inoubliables Hervé et Jean-Claude, retrouvent leurs acolytes pour un dernier tour de piste devant la machine à café.
Allociné : Comment est née l’idée de ce projet ?
Yvan Le Bolloc'h : Personnellement, j'ai adoré faire Caméra Café. J'ai adoré l'écrire. J'ai adoré l'interpréter. J'ai adoré la réaliser. Quand je me replonge trente ans en arrière, quand je sortais de ma banlieue et que j'avais de la terre sous mes chaussures, je me dis que Caméra Café m'a apporté énormément. Ce n'est même pas quantifiable.
Vu l'endroit d'où je venais et les connexions que j'avais dans le métier - c'est à dire aucune -, me retrouver à l'affiche d'un programme ayant conquis tant de monde en France et à l'international, c'était inespéré.
C'est donc quelque chose qui m'est très très cher. D’ailleurs, si on m'avait dit de refaire un épisode pour fêter les dix ans, je l'aurais fait avec autant de plaisir que pour les vingt ans.
Avez-vous eu carte blanche pour aborder les sujets que vous traitez dans cet épisode spécial : Charlie Hebdo, les attentats, le mouvement #MeToo… ? Et comment avez-vous choisi les thèmes abordés ?
Bruno Solo : La carte blanche, on se l'est offerte. C'est à dire qu'on a décidé qu'on ne pouvait pas revenir avec un programme qui soit tiède et qui renie l'idée même de Caméra Café, une série qui a toujours traité d'une manière un peu féroce l'actualité.
On a toujours représenté deux personnages un peu monstrueux, plein de vices et de turpitudes. Malgré tout, on avait de la sympathie parce qu'on aime ces crétins dépassés par les évènements qui pensent être au-dessus de la mêlée.
Quand on a dit à M6 qu'on allait faire cet épisode spécial, ils se doutaient bien que ce ne serait pas dans la crainte des réseaux sociaux qui jugent avant d'avoir vu. On a dit "on y va franco ou on n’y va pas".
Ils ont joué le jeu mais on a été quand même un peu prudents. L'autocensure, ça ne pose pas de problème si ça sert vraiment la cause de l'humour. Au final, on a su trouver cet équilibre qui nous semble le plus juste.
Concernant les sujets choisis, on a regardé dans les journaux les évènements majeurs qui avaient traversé la France sur ces quinze dernières années. Il suffit de regarder sur Google. Il y avait les attentats, les gilets jaunes, les catastrophes naturelles, l'arrivée de l'Iphone, les réseaux sociaux...
Tous ces sujets permettent de trouver un angle humoristique et féroce donc ça n’a pas été le plus difficile. Il fallait surtout le faire accepter et trouver avec nos auteurs le switch qui nous permettait d'en rire.
Yvan Le Bolloc'h : Forcément, il y a des sujets qui sont passés à la trappe car on ne voyait pas la connexion possible avec les membres de l'entreprise. Il y a donc eu des oubliés.
Bruno Solo : Et ce qui nous semble être aussi la vraie bonne idée, c'est cette fameuse journée continue autour de l'éviction de Jean-Claude où on évoque ces évènements à travers un objet, une photo ou un souvenir.
Il fallait que cette évocation soit face caméra parce qu'on n'avait pas les moyens de mettre en scène les évènements évoqués. Et si tu les évoques, comme on l'a toujours fait au travers d'une scène de théâtre, c'est génial.
La journée continue, qui est pour le coup très cinématographiée, était marrante mais en revanche, les évènements marquants, c'est un face caméra assumé. Sur le concept, je pense qu'on a eu une idée originale.
Yvan Le Bolloc'h : Bien connaitre la vie en entreprise fait que quand tu es viré, c'est toujours pareil. Tu rends ton badge, tu fais tes cartons.
On connait tous les images de Lehman Brothers lorsque la banque a fermé en 2008. Tu voyais les mecs sortir leur vie dans un carton. L'idée est donc venue de là. Jean-Claude est lourdé, il est dans son bureau avec son pote et ils sont en train de remplir son petit carton. Et ça, ça va nous renvoyer systématiquement au passé.
Est-ce que cela a été compliqué de réunir tous les acteurs de la série ?
Bruno Solo : Non. Ça a pris trois coups de fil. Il y a eu beaucoup d'émotions. Quand tout le monde est arrivé sur le plateau et qu'ils ont revu le décor qu'ils avaient quitté il y a quinze ans, c'était poignant.
J’imagine qu’il y a eu une émotion particulière de se retrouver dans les décors de Caméra Café avec toute l’équipe de l’époque ?
Bruno Solo : Tous les deux, on s'y est préparé parce qu'on a écrit pendant quasiment un an donc on sentait le truc monter. On a vu les décors se refaire, on a choisi les couleurs, etc.
En revanche, Alexandre Pesle, Armelle ou encore Jeanne Savary n'avaient rien vu avant d’arriver et ça a été une sorte de choc temporel. Ils se sont dit "j'ai quand même pris 20 ans". En même temps, c'est cool de revenir à ces 20 ans qui est l'âge le plus symbolique et le plus charmant qui soit.
Yvan Le Bolloc'h : Ça nous arrivait de leur tendre les mouchoirs.
Bruno Solo : Quelques-uns ont eu la petite larme.
Quel regard portez-vous sur le succès de Caméra Café et votre apport sur les programmes humoristiques courts ? Pensez-vous que sans Caméra Café, des séries comme En famille ou Scènes de Ménages auraient pu exister ?
Bruno Solo : C'est d'autant plus drôle parce qu’En Famille et Camera Café sont produites par Alain Kappauf, le co-créateur de Caméra Café avec nous. Sans aucun doute, il y a donc une filiation sur la forme. Sur le fond c'est très différent.
Vous avez quand même apporté quelque chose au paysage audiovisuel français...
Bruno Solo : On a été parmi les premiers. Mais on a l'honnêteté de dire que c'est l’énorme succès d’un format canadien qui s'appelait Un gars, une fille qui nous a permis de lancer Caméra Café.
On a créé Caméra Café bien avant Un gars, une fille mais ça n'a été à l'antenne qu'en 2001. Malgré tout, c'est grâce à Un gars, une fille que les gens se sont dits que les formats courts pouvaient marcher. On a profité de cet élan mais je pense qu'on a été un peu plus loin dans la vision d'une certaine société.