J’appréciais le manga, bien que ses codes shonen et sa logorrhée dithyrambique du vin étaient un peu abusés, notamment parce que son timing avec la mode de l’accès à l’œnologie tombait pile poil. Si je n’avais aucun doute quant aux déclinaisons futures je n’étais pas impatient de voir le résultat, plutôt craintif même (comme d’hab’), et ben j’avais tort.
Faut dire qu’on parle du manga le plus connu sur le sujet, peut-être pas le meilleur mais qui permet aux novices de pénétrer ce milieu souvent obscur. Facile de se louper certes, surtout que l’adaptation de ce genre de littérature n’a que rarement été réussie. Il faut avouer que Quoc Dang Tran s’en sort bien, en faisant évoluer son héroïne sous nos yeux on sent l’accompagnement et l’identification qu’il recherchait. Malgré ses pouvoirs et ses (trop) rapides progrès, là on colle au manga, on peut suivre cette évolution notamment dans sa façon de tenir le verre de vin. Faire de Shizuku une fille était une bonne idée, non pas pour créer une bête guerre des sexes mais pour avoir une approche différente et une histoire avec un peu de romance qui pimente davantage l’intrigue. De même, donner une histoire à Issei, avec un dilemme et un double enjeu, est un plus appréciable car ça humanise l’antagoniste et rend l’ensemble moins manichéen. En plus Tomohisa joue bien, son stoïcisme correspondant parfaitement au Tomine du support original ; idem pour les comparses de l’héroïne. Les aficionados de l’œuvre de Tadashi Agi ne seront pas déçus car il a validé le scénario et l’ensemble, surtout la fin, peut étonner. Actualiser les vins cités était cool mais en France on n’en saura rien, Loi Evin oblige. Mention spéciale à la tirade du notaire quant aux héritages et leurs conséquences, un propos trop rare alors qu’il est ô combien réaliste.
Mes regrets sont avant tout sur la durée de la série : une saison, 8 épisodes, c’est court. On sent que le réalisateur a du précipiter la narration à la fin donc ça fait bâclé, et vu le sujet, les épreuves possibles, le manga (44 tomes), le développement de l’intrigue et des relations humaines (romances des protagonistes, conséquences du refus du guide etc) il y avait moyen de continuer un moment sans lasser pour autant. Niveau casting je regrette quand même l’absence de Chosuke Honma et son attrait pour les crus italiens, le vieil Alexandre Léger vieux fait pâle figure face au Kanzaki du manga (plus classe et pro), sa version jeune étant très inspirée de Robert Parker (la tirade sur les grands crus bordelais imbus doit venir de lui) elle n’est pas des plus attirante non plus, et si je suis content de retrouver Gustave Kervern en vigneron bourru, il joue néanmoins sa partition sans conviction (limite il récite son texte). Après j’ai trouvé les dialogues moyens, les musiques modernes aux qualités variables et aux placements parfois hasardeux, les longueurs trop importantes dans un ensemble si ramassé, pas trop de lourdeurs mais des coupes dans le développement des persos fort malheureuses
(Thomas se sépare de sa femme c’est juste évoqué, Issei retrouve son père et quitte sa mère en 10 secondes à l’écran, l’héritage est très rapide aussi alors que le propos de toute l’histoire)
, et les plans centrés (souvent dans l’obscurité) ne remplacent pas la recherche d’intériorité des persos.
Bref une association franco-nippone qui fonctionne, bon plan vu la renommée du vin français et son importance dans la culture asiatique désormais, un choc des cultures pas malheureux. Enfin je trouve que ça retransmet bien l’apprentissage de la vie et la transmission via le vin, donc ça se conseille.