Avec une histoire de gros bras torturés franchement gênante, Henry Alex Rubin aligne les clichés avec une ingénuité renversante. Une vision passéiste de l'héroïsme, rivé à un code d'honneur viril et inepte.
Sans retrouver toute la force de "99 Homes", le cinéaste américain poursuit son étude des rapports de dominations. "Le Tigre blanc" a (également) le mérite de restituer une Inde que le cinéma américain mainstream a si peu filmé, ou souvent appesantie d’un regard occidental désolé.
Produit par Michael Bay et tourné dans les rues désertes de Los Angeles pendant l'été 2020, ce premier film labellisé “Covid” évite de mettre en scène le seul réel affect qui a marqué notre confinement, l'ennui, au profit d'une esthétique cheap et épileptique.
Beaucoup de potentiel gaspillé par une mise en scène hésitant entre virtuosité mal placée et sursignifiance symbolique. "Pieces of a Woman" est, comme son titre l'indique [...] l'histoire d'une fragmentation. Mais le film offre surtout deux révélations. D'une part, le grand talent de son actrice (Vanessa Kirby, récompensée judicieusement à Venise), et, de l'autre, une caractéristique frappante de son réalisateur qui ne filme jamais une scène juste pour ce qu'elle est.
On glisse sans déplaisir d’une scène à l’autre, mais jamais l’œil ne s’arrête sur un plan mémorable, sur un quelconque détail qui sortirait le film de son mode pilote automatique.
Hélas, le résultat est d'un académisme vieillot très relou. Jamais G.C. Wolfe ne parvient à donner vie à la pièce de Wilson, qui paraît très didactique, démonstrative et répétitive. Les acteurs en font des tonnes... Dommage.
Une comédie mature et complexe [...] peut-être bien son chef-d’œuvre, en tout cas son film le plus mature, complexe et abstrait – plus encore que Vice-Versa, dont il serait une version adulte [...]. Qu’est-ce qu’une vie réussie, demande benoîtement le cinéaste ? Sa réponse est d’autant plus belle qu’elle ne va en fait pas de soi.
Une comédie triste qui ausculte avec empathie les asservissements produits par la guerre. [...] Si "The Singing Club" est un chant, c'est un chant funeste, mais sûrement pas le feel good movie qu'il se convainc d'être.
Après avoir posé cette question du cynisme de l'artiste face au politique (question fascinante tant elle prend à rebours toute l'œuvre de Murphy), "The Prom" n'en fait malheureusement pas grand-chose. Malgré une Meryl Streep au top de sa forme à plus de 70 ans, le film se noie dans une flasque suite de ronronnantes péripéties et de numéros musicaux sans virtuosité chorégraphique ou musicale.
Une réflexion à la fois ironique et sombre sur l'ambition artistique et un film-somme de son auteur. [...] Le nouveau film de David Fincher est donc l’auscultation de deux ingénieux mécanismes : celui par lequel se construit, pièce par pièce, un des grands films du siècle ; et, de façon connexe, celui par lequel s’autodétruit, strate par strate, l’ingénieur de ce même chef-d’œuvre.
Accents prolo, postiches et fausse commisération : le mélo made in Netflix vire au naufrage. [...] Tout sonne faux dans ce drame complaisant, grossièrement adapté de l’autobiographie d’un hillbilly [...].
Mis à part deux ou trois beaux moments [...] Ball propose une caricature datée du film indépendant américain aux intentions profondes et à la réalité pataude.
"Petite Fille" n'est pas un documentaire militant, mais il évoque les nombreux problèmes de société [...] Petite Fille n'est pas un reportage journalistique, mais du cinéma. Tout y est filmé avec réflexion (on appelle ça la mise en scène). [...] un film bouleversant, devant lequel quiconque ne verse pas une larme devrait être considéré comme un sociopathe dangereux. Cette enfant, Sasha, c’est nous tous·tes.
La star reprend ici, avec dignité, humilité et talent, le rôle de Madame Rosa [...]. Le film de Ponti est de facture honorable, même si l'on peut regretter que ce qui fait le sel du roman, l'humour juvénile, maladroit et désespéré du narrateur, Momo, ait été exfiltré de cette réalisation un peu scolaire.
Sourd à toute remise en question, à commencer par celle d'une époque où les usages de la violence, quelle qu'elle soit, sont questionnés, Marchal rejoue depuis ses débuts la même tragédie complaisante et sans nuance de l'héroïsme rance des forces de l'ordre, dépeinte ici encore telle une bande de bad boys osant tout mais dont la morale cède face à la noirceur du monde.
Adaptée de l’histoire vraie hallucinante d’une “taupe” sous Franco, "Une vie secrète" parvient habilement à joindre la matière théorique de son argument à ce grand geste romanesque qu’est de raconter une vie qui passe.
Le cinéaste Ruben Alves assume un coup d’audace payant, qui implante et défend son personnage LGBT+ dans une comédie grand public. [...] Les deux paris, celui du récit et du film, étant finalement les mêmes : célébrer une différence en la faisant émerger du terreau le plus normatif possible. La réussite d'une telle entreprise est affaire de sacrifices consentis à la norme et d'intransigeance lorsqu'il s'agit de défendre la différence, de la respecter. A ce titre, "Miss" est plutôt une réussite.
Excentrique mais jamais égocentrique, "Garçon Chiffon" suit les chemins rebattus du roman de formation avec ses galères, ses hasards heureux, ses morts et ses renaissances symboliques. [...] un film d’outrance contrôlée, pas tellement survolté, au contraire doux et cotonneux, mais déjà un film-somme qui scelle les obsessions d’un auteur-acteur et porte en apothéose son art de jouer.