« Silien est un ami et j’emmerde tout le monde. »
Tout comme dans Le Cercle Rouge (1970), Jean-Pierre Melville commence son film par une explication du titre. Le doulos est le nom argotique du chapeau, mais aussi de celui qui le porte, l’indic.
Le générique est un long plan séquence de trois minutes en travelling en biais jouant sur les zones d’ombre et de lumière, montrant Faugel (Serge Reggiani), encadré de textes : une introduction à montrer dans toutes les écoles de cinéma tant y sont concentrées les principales techniques de scénographie du cinéma et un hommage au cinéma muet (voir critique du Cercle Rouge, la scène du casse, en particulier).
A la manière des films étasuniens, Melville néglige les dialogues, ils ne font que véhiculer des informations nécessaires, non transposables par l’image, pas du superflu : la littérature propre au cinéma Heureusement, d’ailleurs, parce que ceux-ci sont parfois à peine audibles.
Tout l’intérêt du début du film, outre la fabuleuse présentation d’un milieu, comme une fresque en noir et blanc de personnages typés, est de savoir qui est le « doulos », celui qui porte le chapeau, l’indic, le traître. On comprend pourquoi Tarantino s’est, entre autre, inspiré du Doulos pour son Reservoir Dogs.
Si ce film est un chef d’oeuvre visuel, l’interprétation des seconds rôles tirant parfois du côté réaliste de la Nouvelle Vague, si les liens entre les personnages sont plus qu’intéressants, entre ombres et lumières, si, enfin, le regard posé sur le milieu est empreint d’énormément d’humanité, le scénario est plus obscur, manquant d’explications qui pourraient faire penser à des incohérences (exemple : pourquoi Silien accompagné des policiers téléphone-t-il depuis un bar à d’autres bars alors qu’il aurait pu le faire depuis le commissariat ?). Ces explications seront données tout à la fin en forme de flash-backs, ce qui retire du charme à l’ensemble.