La Moustache est un film qui ne me bottait pas trop. Rien que le speech de départ ça sentait le manteau de sapin. Bon, finalement il y avait de l’idée, mais le résultat ne convainc pas.
Le casting n’est pas désagréable, et Vincent Lindon joue plutôt bien. Il est à l’aise avec son personnage, et parvient à lui donner un certain relief. Même si le personnage reste creux, car on ne saura rien de lui, Lindon lui apporte l’épaisseur nécessaire et entretient bien le mystère autour de ses errances mentales. Face à lui Emmanuelle Devos est correcte mais sans plus. A l’instar de Mathieu Amalric, d’Hyppolyte Girardot, elle n’a pas grand-chose à faire, traversant le métrage avec un personnage sans relief, peu pour ne pas dire pas dégrossi. Elle a juste un rôle d’appoint, servant à mettre en relief le décalage du personnage de Lindon, mais n’existant pas vraiment pour lui-même dans ce métrage. Les interprètes font à peu près ce qu’il faut donc, mais le réalisateur ne s’intéresse pas à l’écriture de ses rôles, et les limites des dialogues et des situations ne leur permettent pas vraiment de s’exprimer à la hauteur de leur talent.
Le scénario est le principal souci du métrage. Le début est intriguant, et curieusement avec presque rien le réalisateur arrive à accrocher son spectateur en commençant vite. Mais sur le long terme ça ne tient pas du tout. Le film s’enlise, devenant une succession de « troubles de la mémoire » de Lindon. Paraissant terriblement long par rapport à sa durée réelle d’à peine 1 heure 20, la plus grosse déception du film c’est la seconde partie. Dès que l’on est en Chine ça perd tout intérêt, et alors la conclusion est ridicule. On ne peut pas faire un film alambiqué, tout en circonvolution et en mystère, et livrer une fin qui ne révèle rien. Là on est un peu comme devant un suspens avec une fin en queue de poisson, autant dire que c’est réellement très très frustrant. En somme on se dit que le réalisateur prend 80 minutes pour nous mener nulle part, et ça c’est très pénible.
Quant à la forme ce n’est pas mémorable non plus. Le réalisateur a une mise en scène très statique, très lente, et surtout très quelconque. On sent qu’il n’a pas trop l’habitude de faire de la réalisation, et son métrage est très plat. Ça manque de rythme, ça n’a pas de vigueur, et finalement j’ai parfois eu le sentiment que le réalisateur se concentrait davantage sur ses décors, sa photographie léchée, que sur le souci de montrer la folie, de filmer les ambiguïtés mentales du héros. Son enfermement peut-être. Ce n’est pas médiocre, mais je peine à comprendre cette tendance de filmer lentement un film déjà très lent. Pourquoi ne pas apporter parfois de la vigueur, pourquoi ne pas montrer la frustration qui peut naître de telles situations ? A noter l’usage de la musique de Philip Glass. On reconnait bien son style, plutôt bienvenu dans un film sur la folie, mais un peu comme du Vivaldi dans un film en costume, c’est d’un classicisme un poil frustrant.
Pour tout dire, La Moustache est surtout un film très mal mené par son réalisateur. Je ne dis pas qu’il n’y a pas certaines séquences intéressantes, mystérieuses, que le fond de l’histoire n’a pas des promesses, mais le traitement lourd, le rythme mou, la fin en queue de poisson, le manque de relief des personnages, tout cela fait qu’on reste au milieu du gué, malheureusement. 1.5