Les "Cannes" se suivent et se ressemblent, en pire même ! L'année dernière, "Un Prophète" était déclaré génial, et avait d'ailleurs reçu le "Grand Prix" : très très surfait (heureusement l'AMPAS l'avait justement négligé pour l'Oscar du Meilleur Film en langue étrangère - tout comme le pesant "Ruban blanc", suprêmement couronné à ce même Cannes 2009) ; cette année, c'est au tour du Beauvois, autre film français, de recevoir cet appréciable lot de consolation. "Des hommes et des dieux" est un beau projet, à morale fédératrice, mais un quasi ratage au résultat - deux étoiles donc pour saluer l'idée, et louer la distribution, excellente en général (avec un plus pour Lambert Wilson habité par la grâce et le tourment, mais un moins pour Michael Lonsdale, un peu trop"lonsdalien", décalé et primesautier, pour être crédible en Frère Luc). La critique professionnelle participe avec un touchant effet de choeur à la réputation de cet affirmé "chef d'oeuvre", même (ou peut-être surtout ?) celle du "boboland" de gauche, charmé de célébrer des hommes de Dieu présentant l"avantage d'être des Catholiques hautement fréquentables puisque "branches", d'"oiseaux" musulmans (en Beauvois dans le texte - le monastère de Tibéhirine étendant largement son ombre tutélaire sur le village en contrebas).
Cette modeste communauté monastique s'était implantée dans l'Atlas juste avant la Seconde Guerre mondiale et n'aspirait qu'à une vie simple dans la règle de La Trappe - prières, méditation, travaux des champs, mais aussi service à autrui grâce à un petit dispensaire ouvert à tous. Elle s'était maintenue sans difficultés après l'indépendance algérienne, le terrorisme du GIA allait signer son arrêt de mort. Pour autant, le sort tragique de 7 des 9 moines présents à Sainte- Marie de l'Atlas dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 est toujours entouré d'une ombre épaisse, et ce n'est pas Xavier Beauvois qui apportera des éléments de réponse en la matière, en dépit d'un récit à ossature chronologique, mais il n'avait sans doute pas d'ambition historique. Qu'a-t-il donc voulu faire ? Un film sur la force de la foi, mais aussi sur les doutes et les angoisses qu'elle engendre, un film donc sur la spiritualité en général et son nécessaire rapport à l'humanité, Tibéhirine n'étant alors qu'un prétexte et une anecdote ? Le gênant est que le cinéaste moraliste se retrouve empêtré dans la description documentaire (beaucoup de longueurs sur le quotidien ritualisé des cisterciens) et que les dialogues où le message est diffusé ne sonnent pas souvent juste. Quant à la mise en scène, elle paraît assez plate à force de jouer sur le détachement et la stylisation, sauf le morceau de bravoure de la dernière (s)cène avant l'enlèvement, montrant en mode muet et en (très) gros-plan chacun des convives se reconnaissant prêt à la Passion, au martyre. Mais là, c'est peut-être trop (superbement) démonstratif.....