Ce qui est terrible lorsque l'on regarde "36 quai des Orfèvres" c'est qu'on se laisse rapidement et facilement prendre au jeu. Le scénario, solidement façonné, s'arrange pour ne laisser aucun temps mort, en nous offrant des rebondissements et des retournements là où on en attends le moins. La galerie de personnages qui nous est présentée ici est très bien interprétée, les rôles sont bien écrits et la psychologie (torturée) n'est pas laissé en reste, ce qui fait que l'on accroche vite à cette histoire prenante et tendue, où Auteuil et Depardieu, vraiment à la limite de la perfection, se livrent une guerre des nerfs pleine d'égo, celle de deux hommes proches mais que tout oppose, qui se respectent autant qu'ils se détestent. En ancien flic, Olivier Marchal dépeint une atmosphère sombre, souvent crédible, sentant de plus en plus le chaos au fur et à mesure de l'intrigue, signant un vrai polar, pur et dur, bien servi par une photographie d'une élégante noirceur et un montage vif et efficace. Néanmoins, sa mise en scène, un peu raccoleuse au niveau émotion et un peu exagérée dans les effets, peut de temps à autre alourdir le film, tout comme la bande-son, omniprésente et par conséquent, parfois un peu oppressante. Et il est vrai que défois, inconsciemment, on ne peut s'empêcher de faire une petite comparaison avec l'excellent et fascinant "Heat" de Micheal Mann, dont "36" n'a pas vraiment la classe et la subtilité, même si ce genre de films français vaut largement à lui seul plusieurs films policiers du "gros cinéma" hollywoodien de ces dernières années.