Oui, bon, je dois reconnaitre, Olivier Marchal signe un polar excellent, sur lequel il n’y a pas beaucoup à redire. Hormis peut-être sur une narration un peu brouillonne (notamment les scènes d’introduction qui par exemple ne se justifiaient pas du tout et complexifie artificiellement le début), et un rythme inégal. Mais c’est vrai que sinon on a un film de grande qualité.
Déjà le casting est solide. Daniel Auteuil trouve un rôle costaud et l’endosse avec conviction, un genre de rôle d’ailleurs qu’il reprendra plus tard avec un succès tout aussi affirmé. Il surprend très agréablement, d’autant que son rôle a de la tenue, et face à lui Depardieu est un flic détestable particulièrement crédible. Moins exposé qu’Auteuil, il n’en reste pas moins marquant et montre encore une fois que c’est un comédien qui ne manque pas de ressources. Autour de ce duo principal des seconds rôles très bien campés eux-aussi. Je note surtout un Roschdy Zem dont on pourra regretter qu’il apparaisse si peu, et le casting féminin qui malgré une présence minime tire son épingle du jeu avec la sobre Valeria Golino et la charismatique Catherine Marchal.
Le scénario est lui aussi très appréciable. A part les critiques émises en introduction sur la narration pas toujours très fluide (surtout au début) et sur le rythme qui tend parfois à jouer aux montagnes russes, pour autant l’intrigue en elle-même est attrayante. Le film offre à la fois des sentiments, de l’émotion, du souffle, quelques scènes d’action solide, et alterne à mon sens fort bien entre réalisme et onirisme, s’avérant d’une grande poésie, sombre et désespéré. Vraiment une bonne histoire, travaillée, et qui se laisse suivre avec plaisir.
Visuellement le film marque beaucoup de points. Outre une mise en scène sobre mais percutante, on appréciera surtout la grande réussite de la photographie et des décors. La photographie est sublime, offrant une ambiance prenante, usant des éclairages artificiels avec talent, donnant une atmosphère violente et mélancolique superbe. Un vrai polar d’ambiance comme on peut les aimer, et qui exploite aussi fort bien les décors, et qui de surcroit s’est doté d’une bande son remarquable. Celle-ci très présente est excellente, et est un vrai personnage à part entière. Je le répète souvent mais c’est là aussi où l’on peut s’apercevoir de l’importance colossale de la musique, et il y a rarement des films très réussis qui n’ont pas une bande son marquante et mémorable.
Franchement 36 quai des orfèvres est une réussite, je n’ai pas peur de le dire. Je craignais un exercice papier glacé avec de belles images mais un fond aléatoire. Au bout du compte voilà du cinéma français qui fait plaisir. 4.5