Dans un film que l’on devine autobiographique, la réalisatrice Greta Gerwig raconte la dernière année de lycée d’une gamine comme beaucoup d’autres, en conflit avec une mère pourtant aimante, qui rêve d’ailleurs. Un énième film sur le passage à l’âge adulte et sur la crise d’adolescence, c’est comme cela que l’on peut appréhender « Lady Bird ». Mais ce serait dommage de n’y voir que cela car le film de Great Gerwig respire la sincérité, il respire la tendresse, l’humanité et n’est pas dénué d’humour non plus. Du côté du style, rien de spectaculaire. Le film est assez dense pour ne pas qu’on s’y ennuie, les scènes tendres sont souvent ponctué par un petit trait d’humour délicat, on ne rit pas aux éclats mais on sourit souvent devant les mésaventures d’une gamine qui nous rappelle furieusement la gamine qu’on a été nous même il y a plus ou moins longtemps. La photographie écrasée du soleil californien est soignée. Le film se déroule sur une année et on se rend compte qu’en Californie, il n’y a pas de saison, il fait soleil tout le temps, même à Noël, ce qui est quand même un peu déprimant ! Le montage est assez rapide, parfois un peu sec et la fin, très abrupte, nous laisse un peu sur notre faim. La musique est agréable, assez omniprésente mais elle sonne bien et elle illustre bien le fait que dans la vie d’une adolescente de 17 ans, la musique est présente en permanence. A mon sens, une des grandes qualités de « Lady Bird » c’est son casting et notamment la richesse de ses seconds rôles. Bien croqués, parfaitement castés, ils sont loin d’être anecdotiques et écrasés par la performance de la jeune Saoirse Ronan. Que ce soit Laurie Metcalf en mère aimante mais à la personnalité trop forte pour ne pas être écrasante, ou Beanie Feldstein en meilleure amie attachante, en passant par Lucas Hedges en petit ami maladroit et mal dans sa peau, tous incarnent des personnages profonds, complexes, et ils le font remarquablement bien. Saoirse Ronan, quant à elle, est très juste dans le rôle de cette adolescente révoltée juste ce qu’il faut, qui n’assume pas la condition sociale de ses parents, et qui rêve d’un ailleurs où forcément, l’herbe sera plus verte. C’est une fois le pas franchit qu’elle se rendra compte, comme c’est toujours le cas, que l’herbe peut être verte partout, il suffit de savoir comment la regarder ! Le scénario est sans surprise, dans le sens où une gamine qui se cherche et fait sa petite crise, c’est le sujet le plus banal du monde.
Elle va passer par tous les étapes : mentir à sa mère, à sa meilleure amie, perdre sa virginité avec un type décevant, faire enrager ses profs, tomber amoureuse d’un autre garçon qui ne lui avoue pas qu’il est attiré par les garçons, aller au bal de promo, etc…
Raconté comme cela, je me rends bien compte que cela ne fait pas très envie. Ici, il n’est pas question d’une muette tombant amoureuse d’un amphibien dans un laboratoire de l’US Army, et pourtant… Et pourtant je me suis beaucoup moins ennuyé à regarder les émois de « Lady Bird » que devant « La Forme de l’Eau » il y a quelques jours ! Les aventures de Christine « Lady Bird » ont beau être d’une banalité totale, elles parlent au cœur autant qu’au cerveau. Ici, on est dans la tendresse toute simple, l’humanité toute bête : l’amour maladroit entre une mère et sa fille, l’amitié sincère entre deux filles un peu trop « différentes » pour être pom-pom Girl, les soucis financiers d’une famille middle-class classique, qui essaie de bien faire avec ce qu’ils ont, la prise de conscience tardive d’une adolescente qui se rends compte qu’elle est, somme toute, fière de ce qu’elle est, de ce que sont ses parents, du vécu qui est le sien. Et puis on y aborde de biais les thèmes de l’homosexualité, de la différence, de la dépression aussi, de la crise économique. « Lady Bird » est un film qui, au-delà de son histoire toute simple, ratisse bien plus large qu’on ne pourrait le croire. Alors évidemment, ce n’est pas le film de l’année, c’est trop peu spectaculaire pour cela, mais c’est un joli film sans aucune prétention qui mérite bien une petite place de cinéma.