Au début, on se dit que tout cela ne semble pas très intéressant et long à démarrer. Puis, s’ajoute à ce sentiment, l’impression que c’est un sujet complexe et pas très cinématographique qui est ici peu expliqué ou mal introduit (le monde de la finance et des fonds d’investissement et celui des petites entreprises mécaniques). Mais, petit à petit, Gilles Perret va vulgariser tout cela du mieux qu’il peut avec ses scénaristes. Il y parvient souvent mais pas toujours et c’est le prix à payer avec de tels sujets en même temps très sérieux et conséquents mais aussi éminemment complexes pour tout néophyte. On n’est certes pas dans « The Big Short », pour lequel certains passages demandaient presque un doctorat en finance malgré les essais notoires et amusants de simplification, mais il ne faut pas chercher à trop entrer dans les détails pour apprécier « Reprise en main ». Car si ces sujets sont le contexte du film, ils n’en sont pas non plus la sève qui est plutôt une critique du capitalisme et une ode aux petites entreprises.
« Reprise en main » est donc à la fois un drame social mâtiné de suspense mais aussi un véritable pamphlet anticapitaliste et finance qui parvient à rester léger. Et ça c’est fort... Et cela va à l’encontre des films de Stéphane Brizé par exemple qui jouent sur le même registre, des œuvres souvent excellentes mais très sérieux et tragiques. Le début est donc laborieux et il faut noter que Perret ne soigne pas particulièrement ses images, rangeant son film dans la catégorie téléfilms de luxe davantage que film de cinéma sur le plan formel. Ça pourrait être le genre de production qu’on propose aux téléspectateurs avant un débat sur le sujet. Mais, heureusement, une fois que les enjeux se mettent en place et que le script a éclairci les points les plus élémentaires pour bien saisir l’intrigue, on commence à se prendre au jeu. Et là, « Reprise en main » devient prenant et intéressant jusqu’à un final qui fait (forcément) du bien en étant jubilatoire et galvanisant par son côté vengeance sociale des petits sur le grand capital.
Il y a d’ailleurs un peu de Pierre Jolivet et ses films sur les entreprises ici avec la manière de traiter de façon plutôt amusante et pas trop grave le sujet. Mais, à la base, Gilles Perret est un documentariste connu et reconnu dont les projets sortent souvent en salles sous les applaudissements (récemment « La ferme des Bertrand » ou plus anciennement « Les jours heureux »). Ceci explique peut-être aussi la forme pauvre délaissée au profit uniquement du constat social, le néo-cinéaste étant un homme de convictions fortes et totalement dévoué à la cause des petits (entreprises, personnes, pauvres, minorités, etc). Son passage au long-métrage de fiction est donc tout de même une réussite sur le fond, où l’homme ne se trahit pas. Et il s’est entouré d’un casting de toute beauté avec un Pierre Deladonchamps très convaincant dans ce rôle de petit mécanicien qui prend son destin en main, épaulé pas le trop rare Grégory Montel et la toujours excellente et versatile Laetitia Dosch, avec qui il avait déjà partagé l’affiche dans le touchant et amusant « Petite leçon d’amour ». Bref, « Reprise en main » est peu flatteur dans ses débuts mais se révèle au final un film engagé plutôt agréable.
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