Un garçon timide aux cheveux frisés arrive, guitare à la main, à l’hôpital psychiatrique Greystones, non loin de New York, rendre visite à son idole Woody Guthrie, père de la protest song, atteint de la maladie de Huntington, et auquel son ami Pete Seeger, autre protest singer rend visite. Nous sommes au début des années 60 et Robert Zimmerman a 19 ans. Devant les deux amis, il se met à jouer une ballade qui les laisse pantois...Bob Dylan est né et devient comme le Rimbaud de la folk song...Pour l’heure il doit s’imposer dans un milieu riche de talents, et s’installe chez Sylvie, séduite dans un club ( dans la vraie vie Suze Rotolo, artiste qui a fortement influencé la musique et l'art de Bob Dylan au cours de cette période 1961-64) et courtise en même temps que Sylvie Joan Baez, déjà reconnue qui impose Bob Dylan et ses chansons au public américain ainsi qu'au monde entier. James Mangold le réalisateur de ce long biopic de 2h20 a choisi un casting pertinent et assez remarquable...Timothée Chalamet en Bob Dylan, Monica Barbaro en Joan Baez, Elle Fanning en Suze Rotolo, Edward Norton en Pete Seeger...Pour les gens de ma génération, Bob Dylan et Joan Baez, se sont des heures d’écoute, entre deux manifestations pour la paix au Vietnam... Et à vrai dire, il n’y a aucune raison d’être déçu au bout de ces 2h20, tant le résultat, assez peu émouvant et très didactique en l’état, peut s’assimiler à un concert dont le programme et l’ordre de passage des invités ne varient jamais d’un iota. Jusqu’au moment où l’on voit l’artiste archi-intronisé tenter d’échapper à cette célébrité aliénante en se la jouant rebelle de l’industrie folk en plein festival de Newport, haut lieu de l’orthodoxie folk, en branchant sa guitare sur ampli et entrer ainsi en conflit avec tous ceux qui ont tenté de le compartimenter. Alors, oui, Dylan n’a jamais cherché à nier ni à freiner sa propre complexité, passant sans crier gare d’un courant musical à l’autre (de la ballade folk au rock agressif) et assumant même sa roublardise avec une forme de provocation que Chalamet réussit très bien à incarner...mais quand un biopic semble à ce point formaté et conformiste effaçant une grande partie de sa carrière et certaines dérives de sa personnalité du personnage on aura compris que le cinéaste n’a eu d’autre souci que d’imprimer une légende...