« Pitié, j’t’en supplie, tu dois m’faire sortir d’ici. » (Evil Dead 2013). Par ces mots Mia implorait son frère David de fuir prestement les décors emblématiques d’Evil Dead, une cabane perdue au fin fond d’une forêt lugubre.
Ici, exit la vieille bicoque au profit d’un immeuble tout aussi peu accueillant dans la banlieue de Los Angeles. Un parti pris qui, nous allons le voir, se révèle être un échec.
Evil Dead c’est avant toute chose cette cabane glauque et sa cave anxiogène, son magnétophone (cf. Evil Dead 1981) ou son livre des morts, le Nécronomicon (cf. Evil Dead 2 et l’excellent remake de 2013).
Amputé d’une partie de ces éléments constitutifs, le métrage souille dès lors l’essence même de la Saga.
Malgré cette tentative d’innovation, force est de constater que la sauce ne prend pas. La recette ancestrale du sempiternel démon assoiffé d’âme et de sang dans un bois sinistre demeure toujours plus efficace. Ainsi, rares sont les scènes terrifiantes et le spectateur restera sur sa faim.
Tout d’abord et pour être tout à fait exact, nous arpenterons à nouveau le plancher de la cabane et les sentiers battus de la forêt lors de la scène d’introduction aussi brève qu’inutile
histoire de satisfaire l’appétit du puriste et de rassasier le spectateur. En somme, un cheveux sur la soupe car cette mise en bouche n’aura aucune incidence ni aucun lien avec le menu principal proposé.
Aussi subtil que du sucre dans des pâtes, le scénario d’Evil Dead cuvée 2023 est aussi médiocre que niais. L’intrigue, vide de sens, m’a donné le vertige. Couplé à la bêtise pathologique des protagonistes ce sont les deux seuls aspects qui m’ont fait frissonner de peur.
Pêle-mêle : les multiples « est-ce que ça va ? » ou encore « tu vas bien ? » agrémenté d’un rapprochement physique alors même que le possédé viens de grimper au plafond en criant en latin avec une voix démoniaque, l’enfant qui s’immisce dans une faille sismique après un tremblement de terre avant de s’emparer d’un grimoire recouvert de cafards trouvé dans un sarcophage a l’intérieur d’une crypte constellée de crucifix. Et non, nous ne sommes pas dans le nouveau film La Momie. Ce même grimoire qu’il décide de ramener chez lui ne s’ouvre qu’au contact d’une goutte d’hémoglobine ce qui n’interloque ni le garçon ni sa sœur. Enfin la tante qui trouve opportun de s’équiper d’un casque à réduction de bruit et de laisser les enfants livrés à eux-mêmes dans le salon tandis que leur mère, qui rôde encore, a des velléités de les envoyer direction l’Enfer illico presto.
Mention spéciale au prêtre qui, dans un vinyle trouvé à côté du Livre des Morts, met en garde l’auditeur contre la dangerosité dudit livre mais… récite tout de même les incantations dans le cas où l’heureux possesseur aurait une certaine envie de danser le tango avec Johnny Hallyday.
Ce même scénario semble avoir été pensé par Jason Seagal, si celui-ci avait voulu écrire un film d’exorcisme/possession de série Z, tant les situations ubuesques se succèdent. Coucou Bridget possédée qui vole comme Superman (Henry Cavill a du souci à se faire).
Ne sachant pas sur quel pied danser et s’il doit faire rire ou faire peur, Evil Dead Rise se révèle être un hybride immonde entre le second opus et le remake de 2013 parsemé de certaines scènes frôlant le pittoresque : dédicace à l’œil arraché puis recraché par la matriarche dans la bouche de son jeune voisin qui meurt étouffé faute d’avoir reçu la manœuvre Heimlich.
J’ai presque été surpris de ne pas voir débarqué Shorty et Ray (aka les frères Wayans) à force d’enchaîner les scènes aux allures parodiques.
La réalisation, quant à elle, est frileuse, c’est un doux euphémisme. Les scènes de gore sont édulcorées et bâclées au possible lorsque l’on compare le métrage à son prédécesseur.
Enfin, le maquillage digne d’un Halloween à la kermesse du village et les CGI parfois superflus défigurent l’œuvre ne nous servant qu’une bouillie visuelle particulièrement insipide (du faux sang en CGI dans Evil Dead, vraiment ?). Moins sanglant que son aîné j’en convient, ce n’est pas surprenant d’apprendre que seulement 6.500 litres de faux sang ont été utilisés contre 260.000 (!) en 2013.
Enfin, une question me taraude toujours l’esprit concernant le réalisateur. Pourquoi confier les rênes d’un tel projet, de l’une des franchises les plus importantes du Cinéma d’horreur, à une personne qui a fait autant de bons films que Max Boublil.
Des artistes ayant déjà fait leurs preuves dans le domaine tels qu’Alexandre Aja ou Eli Roth, pour ne citer qu’eux, m’aurait semblé être des choix plus pertinents.
Pour conclure ce métrage n’a d’Evil Dead que le nom, ne profanant au final que le matériau de base ; Evil Dead Rise ne s’est en aucun cas élevé.
Lors du visionnage de ce film, comme Mia dix ans avant moi, j’aurais aimé que l’on me fasse sortir d’ici.