Cela n’est pas un film à sketches mais une succession de saynètes : même si certaines sont drôles (
1ère scène, juste avant le générique, où un pope orthodoxe perd son calme devant la porte fermée d’une église à Nazareth
) ou absurdes [
voisin d’Elia Suleiman qui lui vole, sur ses arbres, des citrons mais aussi les arrose (métaphore d’Israël vis-à-vis de la Cisjordanie ?), balayeurs parisiens jouant au golf avec leurs balais et des canettes, le caniveau faisant office de trou, policiers (omniprésents à Paris) prenant les mesures d’une terrasse de café, rencontre avec Gael Garcia Bernal qui veut faire un film sur la conquête hispanique des Amériques mais dont les producteurs souhaitent qu’il soit tourné en anglais]
, d’autres sont inutiles (
couple de Japonais cherchant Brigitte, lutte prédatrice de chaises dans le jardin du Palais Royal, Elia Suleiman donnant une « master class » à des étudiants américains déguisés en animaux pour Halloween, femme arabe portant une cuvette dans un champ d’oliviers
). D’où l’intérêt de faire plus court (1h37). Le film est la vision de la France (surtout de Paris déserté au 14 juillet, y compris dans le métro, ligne 12) et des Etats-Unis (
citoyens faisant leurs courses en étant surarmés, policiers poursuivant une femme déguisée en ange dans Central Park, à la façon des comédies burlesques muettes du studio américain Keystone
) par un Palestinien mutique, façon Buster Keaton ou Jacques Tati (avec une façon similaire de filmer, en plans fixes), au chapeau de paille vissé sur la tête ; il y a, certes, de la poésie (
moineau intrusif sur le clavier de l’ordinateur Apple du cinéaste
) mais le film est brouillon, désordonné et part dans tous les sens. Dommage car il y a une vraie question que pose le réalisateur, dans une scène : un cinéaste palestinien peut-il parler d’autres choses que de la Palestine ? C’est autour d’elle [où le producteur Vincent Maraval, fondateur de la société de distribution Wild Bunch (impliquée réellement dans le film lui-même), joue son propre rôle] qu’aurait dû être construit le film ;
2 scènes y font allusion : l’une où une cartomancienne annonce au cinéaste qu’il y aura une Palestine mais pas de son vivant, l’autre où un arabe lui dit que les Palestiniens boivent pour se souvenir et non pour oublier comme les autres peuples.