D'un côté les grands ensembles et les pavillons bourgeois ultra-modernes; de l'autre, séparé par un muret métaphorique qui tombe en ruine, un quartier villageois qui fleure bon la France des faubourgs, la France populaire et conviviale, avec ses marchés où on s'interpelle, avec ses terrains vagues où jouent les enfants.
Le regard que Jacques Tati porte sur la coexistence de ces deux sociétés dont l'une, celle où vit son personnage Hulot, est vouée à disparaitre, est déjà nostalgique et, peut-être, un peu réac dans sa façon de moquer la modernité. Tout au long du film, Tati oppose la liberté de Monsieur Hulot, l'oncle bienaimé du petit Gérard, à l'asservissement de son beau-ftère à la société contemporaine démesurément robotisée, automatisée et minutée. à son architecture nouvelle, glaciale et dépouillée.
Tour à tour satirique et poétique, la comédie de moeurs s'installe le plus souvent dans le cadre de vie des parents bourgeois d'Hulot, lequel est bien mal à son aise dans un habitat expérimental qui fait la fierté de la famille et ravit leur snobisme. Leur attitude, autant que le mobilier et les gadgets plus ou moins fonctionnels qui conditionnent ce nouveau mode de vie, est source inépuisable de gags burlesques.
Très visuelle et peu dialoguée (pour sa part, Hulot ne prononce qu'un seul mot), la comédie relève, avec une espièglerie dénuée de méchanceté, les dysfonctionnements du modernisme. La comédie est savoureuse et sa forme, indissociable du fond, rappelle que, si Tati, acteur et remarquable mime, a conçu un personnage mémorable, il est aussi un cinéaste précis, maitrisant parfaitement sa réalisation et fourmillant d'idées.