Décidément, Xavier Dolan est un réalisateur bien particulier ! Après avoir réalisé « Mommy », considéré par beaucoup comme son meilleur film, le cinéaste canadien est revenu à Cannes en 2016 pour présenter cette adaptation de pièce de théâtre qui lui a valu rien de moins que le Grand Prix du Festival ! Alors, réussite ou échec ?
« Juste la fin du monde » nous présente Louis, un jeune homme parisien qui revient dans sa famille après 12 ans d’absence pour lui annoncer sa mort prochaine. Mais arrivera-t-il à placer seulement un mot alors que cette famille est toujours en éternel conflit ?
Autant le dire de suite : « Juste la fin du monde » n’est clairement pas un film accessible à tous les publics. En effet, le film parle de thématiques très dures comme la mort, l’abandon, la distance entre les proches, ou encore la violence conjugale. Si Xavier Dolan se livre à un sacré exercice de mise en scène qu’on pourrait presque comparer à du Lars Von Trier (caméra à l’épaule très présente, ambiance sombre et discours pessimiste, couleurs froides, sentiment de malaise…), le scénario se perd en ne nous donnant pas assez d’explications sur pas mal de choses : pourquoi Louis va-t-il mourir, pourquoi est-il parti de chez lui, quel est le véritable objectif de son frère envers lui… Tant de questions qui resteront sans réponses du début à la fin.
Et pourtant, le film est adapté d’une pièce de théâtre écrite en 1995 par le dramaturge Jean-Luc Lagarce qui est un des auteurs français les plus joués dans le monde. Et comme vous le savez sûrement, un film adapté d’un livre c’est comme un exposé en classe : il faut partir du principe que personne ne connait rien à ce qu’il va regarder et apprendre. Autrement dit, faire un film qui s’adresse aux gens qui ne connaissent pas la pièce. Ici, Dolan commet l’erreur de ne pas rendre la pièce accessible au grand public. Il se contente de l’adapter certes de façon plus moderne (les téléphones portables, le fait que Louis soit homosexuel…), mais les dialogues sont longs, plein d’hésitations et pas toujours clairs. Les personnages essaient tous de faire de la philosophie à leur sauce en se perdant dans des explications, tandis que nous comprenons tout de Louis d’un seul de ses regards ou gestes.
Venons en d’ailleurs au casting : celui-ci est 4 étoiles ! Nathalie Baye se révèle excellente en mère qui cache un double-jeu auprès de ses enfants. Léa Seydoux joue très bien une ado insouciante ne connaissant rien au monde. Marion Cottilard passe un peu inaperçue mais reste une actrice dont on ressent bien la présence chaque fois qu’elle est à l’écran. Gaspard Ulliel est touchant au possible mais n’a pas beaucoup de texte, ce qui est dommage. On retiendra surtout la performance de Vincent Cassel en grand frère de Louis qui est colérique, violent et incapable de se remettre en question. C’est sûrement un des meilleurs rôles de sa carrière.
On notera une bande musicale prenante et s’intégrant parfaitement aux images (mentions spéciales à « Natural Blues » et « Dragostea Din Tei ») ainsi que des décors respectant bien le fait qu’on est dans une pièce de théâtre (les pièces de la maison, une voiture et un jardin).
Au final, « Juste la fin du monde » est un film intéressant de par ses thématiques mais reste pour moi assez inaccessible à un public large.