Déjà dès les premières minutes, on sent qu'on est devant un film qui sort des sentiers battus quand il nous annonce que nous allons avoir le droit à un peu de musique le temps que les logos des distributeurs fassent leur apparition sur grand écran. Et puis après la folie ne s'arrête pas. Pour sa deuxième réalisation, Antonin Peretjatko frappe fort et frappe bien. A travers une comédie délicieusement exotique et absurde, pas loin du De Broca de "L'Homme de Rio", il dénonce tous les travers de notre société. "La loi de la jungle" voit Marc Châtaigne, stagiaire du Ministère de la Norme, envoyé en Guyane pour vérifier que le chantier de la construction de Guyaneige, première piste de ski intérieure en Amazonie, soit aux normes européennes. Là-bas, il va rencontrer Tarzan, elle aussi stagiaire, elle aussi en galère dans la moiteur de la Guyane. Et tous deux ne vont pas tarder à se paumer dans la jungle. Donnant le ton dès ses premiers instants, "La loi de la jungle" enchaîne ensuite au moins une idée par plan et par scène dans un rythme endiablé. C'est parfois un peu décousu mais la comédie fonctionne à plein tubes, nous gratifiant de savoureux moments en tous genres, que ça verse dans l'absurde, le gore, le comique de répétition ou le sens du détail. Et puis surtout c'est mordant, fustigeant au passage tous les travers de la France. On y parle de la colonisation, du trop-plein de "Je suis Charlie", de la montée du FN, de l'absurdité de la politique européenne et de ses normes, de la déforestation, des systèmes de financement étrangers (avec des investisseurs rassurés quand on leur dit que le projet ne créera pas trop d'emplois), des huissiers et de leur ténacité... Mais surtout on y parle du stagiaire, le stagiaire, fer de lance de toute une partie de la France qui la tient sur ses épaules au mois d'août quand tout le monde est en vacances. Le stagiaire qui, à 27 ans, moyenne d'âge des généraux de Napoléon, galère encore à faire des rapports de stage et à faire le travail que personne ne veut abattre. Si Antonin Peretjatko est clairement dans la dénonciation, ça reste tourné dans un univers très ludique avec un langage cinématographique qui lui est propre. On est dans un univers délicieusement foutraque, bourré d'idées (la scène de bagarre de saloon tout droit sortie d'une BD ou la scène où les héros sont drogués aux aphrodisiaques) et bardé de tranches de rires. C'est un univers délicieusement foutraque certes mais dans lequel rien n'est laissé au hasard (la rigueur de l'arrivée des gags et du timing des acteurs) et où l'amour finit par triompher dans la moiteur de la jungle. Lui, Châtaigne, interprété par un Vincent Macaigne qui n'est jamais aussi bon que lorsqu'il est paumé, elle Tarzan, campée par une Vimala Pons débordante de sensualité. Il faut la voir clope au bec, short aux jambes et papillon sur la poitrine pour tomber sous le charme débordant de cette actrice, de son corps de rêve et de sa fougue parfois brûlante, parfois plus douce. Si "La loi de la jungle" est une vraie réussite, singulière dans un cinéma français souvent trop étriqué, Vimala Pons est la cerise sur le gâteau, la seule et unique raison de voir ce film alors qu'il en a beaucoup d'autres. Rien à redire, laissez-vous glisser sur la pirogue de Peretjatko, vous ne le regretterez pas.