Une histoire vraie.... bon, je me garderai de vous dire pour la trente-troisième fois que la réalité est un bien meilleur scénariste que le plus talentueux jeune écrivain sous LSD, mais avec l'histoire de la belle petite famille Puccio, on atteint des sommets....
Je ne la connaissais absolument pas, d'ailleurs je suis entrée au cinéma à la première séance du mercredi de la sortie du film sans savoir du tout de quoi il retournait, sinon que je pensais que c'était bon..... Politique ou polar? Je ne le savais même pas. En plus, les premières minutes du film qui nous montrent plein de gens différents, plein d'actions disjointes auxquelles on ne comprend rien n'aident pas à entrer dedans. On les comprendra plus tard -ne vous inquiétez pas.
Je me suis donc précipitée en rentrant sur Wikipedia, il y a des milliers d'articles sur Arquimedes Puccio -mais tous en espagnol. Apparemment, la renommée du personnage n'a pas traversé l'Atlantique....
Il a été un agent de renseignement des colonels, il a même rempli des fonctions importantes du temps de la junte. Cela permettait de faire mener à sa jolie petite famille une vie des plus confortable. Famille bourgeoise, unie, affectueuse, avec une mère professeur de lycée Lili Popovitch) et cinq enfants; deux filles aussi ravissantes que bien élevées et trois garçons, mais l'un d'eux est parti et n'a plus donné signe de vie. Les deux autres sont fous de rugby et l'ainé, Alejandro, (Peter Lanzani) est une vedette de l'équipe nationale des Pumas. Tout le monde va à la messe et on dit la prière avant le repas. Je vous invite à aller sur Wikipédia voir comme ils ont l'air charmant, quant à Arquimedes photographié à la fin de sa vie avec une grande barbe, on croirait Hubert Reeves. On lui donnerait le Bon Dieu sans confession....
Hélas! arrive 1983, exit les colonels. Que faire pour continuer à mener une existence aussi cossue? Ce qu'on savait si bien faire du temps de la junte: des enlèvements... Enlèvements avec rançon, mais en général même si la rançon a été payée, ça finit mal, très mal pour le kidnappé. Qui a passé quelques temps dans une cave sous la demeure familiale, sous le joli magasin d'articles pour surfers qu'on a pu acheter pour Alex.
Puccio a construit son gang avec deux relations du bon vieux temps des colonels.... mais surtout, il fait travailler ses fils. Le premier enlevé est d'ailleurs un jeune rugbyman, riche fils de famille et ami d'Alejandro.... Monstrueux! et je crois que la force du film de Pablo Trapero est de nous faire appréhender cette extraordinaire relation d'affection /soumission entre Arquimedes et ses fils. Et au choix du magnifique acteur qu'est Guillermo Francella. Avec ce visage qui, de souriant, peut passer à une terrifiante expression de férocité, s'il a la sensation que son esclave -car on peut bien parler d'esclavagisme psychologique pour Alex! va lui échapper. Relation qui culmine à la fin du film dans une magnifique scène carcérale....
La faiblesse du film de Trapero est sa confusion. Il virevolte entre scènes de famille et scènes de violence, mais c'est souvent un patchwork pas forcément clair. En plus, il laisse entendre que Puccio était toujours protégé. Autrement dit, qu'après le retour à la démocratie existaient encore des groupes d'influence politico/mafieux, puissants, capables de garantir une impunité totale aux anciens collaborateurs. Quel est ce mystérieux colonel qui dispose toujours de bureaux et de pouvoir? Là, on n'y comprends vraiment rien, alors, pour Trapero, ou bien fallait pas y aller, ou bien ne pas rester dans le non-dit. Pour cette raison, le film est pas mal -sans plus.
Une chose frappante est l'absence de toute morale dans tout ça. On est loin des mafieux tourmentés de Scorcèse.... Là, on dirait que toute humanité a déserté les personnages. Des robots agiraient de la même façon. Faut croire que c'est parce que les mafieux de Scorcèse sont des personnages de fiction qu'on leur a donné un peu d'âme....