"Mon Roi" est à la fois d'un tout autre registre que le très réussi "Polisse" et pourtant quelque part pas si différent...
D'un presque reportage âpre sur l'étude d'un milieu, celui de la brigade des mineurs, on arrive ici à l'étude profonde et vive d'un couple et de sa relation.
D'une mini société en crise, on passe ici à une sphère plus intime, plus réduite en devenant celle d'une femme et d'un homme sous forme d'un témoignage également, très violent où tout est décortiqué dans le plus profond de l'âme et des sentiments ! Le scalpel entre à vif, remue ce qui est à remuer, n'oublie rien de rien, pour nous expliquer toute l'ambiguïté du fonctionnement ou du dysfonctionnement de ce couple...
Tout est écorché, rude, extrêmement viscéral, fait de rires, de larmes, de cris, de douleur...
Perversion, cynisme, manipulation, calcul, plaisir et séduction pour l'un, puis admiration, dévotion, amour, fascination pour l'une, donnant un mélange explosif qui se retourne parfois dans un sens ou dans l'autre en fonction de ce que chacun utilise comme arme envers l'autre !
Quand l'un domine et décide, l'autre vacille et bascule jusqu'à un point où l'effet inverse arrive quelquefois à se mettre en place indiciblement.
L'un prend, l'autre donne et cède sous forme d'une lutte, d'un marché de tous les instants...
Des mécanismes terribles afin d'utiliser et d'aimer dans la souffrance, dans l'humiliation avec de temps à autre un retournement subit, bref pour mieux rebasculer, tel le principe des vases communicants !!!
Ce que l'un prend, fait du mal à l'autre, et vice-versa !
"Tu me fuis, je te suis; tu me suis, je te fuis !"
Pour cette démonstration à feu et à sang, Emmanuelle Bercot se frotte et se donne à Vincent Cassel avec une puissance, une vérité terrible, tandis que l'acteur est d'une cruauté, d'un calcul épouvantable !
Seul le clairvoyant Louis Garrel est le reflet "raisonnable" et bienveillant de l’œil du spectateur...
Des rôles plus que taillés sur mesure pour un cas d'étude quasi pathologique mais passionnant à suivre !
On reste toujours fasciné par cet engrenage sans fin, où chaque petit rouage avance beaucoup puis recule un peu, afin de faire trembler et se fissurer ce couple de toutes parts, juste avant qu'un petit plâtrage recolle, pile à temps l'ensemble de l'édifice !
Passion dévorante, plaisirs de l'instant, Georgio brûle la vie par tous les bouts, riche, charmeur et séducteur, il aime cette femme mais veut surtout un enfant, c'est peut-être la raison de choisir une mère qui n'est pas de son milieu de paillette et de strass illustrée par cette fameuse Agnès...
Tandis que Tony elle, aime cet homme qui l'étonne et l'amuse, la déstabilise mais finit par évoluer aussi, en souhaitant une stabilité, un mari, un père,...
Maïwenn nous propose là un film dur, très dur, éprouvant loin de la douceur habituelle et fleur bleue de la romance cinématographique !
Un travail sous forme d'une approche psychologique exacerbée très réussie, même si le moment présent du film est représenté par ce passage en hôpital à Berck (?), suite à une rééducation douloureuse, ce qui n'est pas forcément des plus opportun, ne se justifiant essentiellement et pleinement comme seul prétexte pour une prise de recul, une analyse, une introspection pour Tony.
Du bon cinéma assurément extrêmement captivant, mordant et épuisant, dont la direction d'acteurs d'une intensité rare, est la clé de sa réussite, même si faire le choix de présenter trop souvent, un milieu toujours très riche et bourgeois implique des situations faciles, des solutions échappatoires simples, évidentes toutes trouvées aux problèmes matériels ou existentiels du moment (Deauville, Bruxelles ou Marrakech pour un week-end ?), un aspect provocateur pour l'homme lambda que lui ne pourra pas mettre en œuvre, entre son boulot et les quatre murs de son appartement ou pavillon et avec ses propres perspectives financières bien plus modestes !
Mais même dans les situations de crise les plus graves, il est toujours bien plus simple de vivre au cinéma que dans la vie !
Un peu de part de rêve donc quand même au sein de cette histoire de cœur, tranchante et bouleversante dont le fonctionnement torturé est pourtant celui, à plus ou moins grande échelle, de certains couples !
Amour et haine, attirance et répulsion font parfois "bon" ménage !