« Look ! Up to the sky ! It’s Superman ! »
Premier film à proprement parler de Joe Dante, premier scénario de John Sayles qui écrira également Hurlements du même réalisateur, Piranhas reprend la même angoisse et parfois les mêmes ficelles visuelles que Jaws/Les Dents de la Mer de Steven Spielberg sorti 3 ans plus tôt mais avec un budget 8 fois moindre et en passant de la mer à la rivière, du prédateur naturel aux expérimentations génétiques à des fins militaires. On pourra aussi penser aux Oiseaux d’Alfred Hitchcock (1963) pour le nombre et la capacité d’adaptation d’animaux a priori inoffensifs.
Au niveau de l’interprétation, on est dans un casting bon marché avec des acteurs et actrices cantonné·es à la télévision ou aux apparitions dans d’autres films d’horreur, à l’exception de trois fidèles de Joe Dante : Kevin McCarthy, Belinda Balaski et, surtout, l’indéboulonnable Dick Miller.
S’il s’agit de la première réalisation en solo de Joe Dante, on peut déjà y repérer certains de ses gimmicks, notamment les dessins animés à la télé (ici un poisson se débattant d’un hameçon, procédé repris dans Hurlements, 1980, avec un loup voulant découper un agneau ou, plus mythique encore, le segment It’s a Good Life dans La Quatrième Dimension, 1983, tout entier dédié aux horreurs propagées par les comics télévisuels).
Inspiré par la Nouvelle Vague française et le Néoréalisme italien, le cinéma indépendant qui a révolutionné le septième art aux Etats-Unis dans les années ’70 est marqué par la violence, les meurtres, voire les massacres réalistes (qu’on pense à Taxi Driver, Martin Scorsese, 1976) ou l’abolition de la règle qui interdisait de faire l’apologie de criminels (Bonnie and Clyde, Arthur Penn, 1967). Chez d’autres réalisateurs, cet affranchissement des codes (dont le fameux Code Hays) s’est aussi exprimé par la libération des mœurs, l’exposition de la nudité (masculine et féminine) et l’expérimentation pornographique. Ces derniers points sont récurrents chez le jeune Joe Dante (tout comme chez son pote John Landis ou chez Brian de Palma).
Ainsi, sans être un chef d’oeuvre, ressemblant plus à un film de commande de série B qu’à un film d’art et d’essai, Piranhas porte en germe tout le talent, toutes les influences, toute la densité que Joe Dante appliquera à ses œuvres futures, dont l’inoxydable Gremlins. Plus thriller qu’horrifique, il s’agit enfin d’un film très rythmé, bien équilibré et ponctué de gags inattendus.