Michel Gondry, réalisateur ambivalent, entre productions américaines et productions françaises, revient vers sa patrie en s’attaquant à un chef d’oeuvre de l’après guerre, «l’Ecume des jours» de Boris Vian. Colin (Romain Duris) vit convenablement et Chick (Gad Elmaleh) son meilleur ami, fan inconditionnel de Jean Sol Partre, vient de rencontrer une jeune fille, Alise (Aissa Maïga), nièce du cuisinier de Colin, Nicolas (Omar Sy) ce qui donne envie au héros de lui aussi trouver l’âme soeur. Il rencontre alors Chloé (Audrey Tautou) à une soirée. S’ensuit une histoire d’amour poétique, mais malheureusement cette dernière est malade : un nénuphar pousse dans son poumon droit.
L’adaptation cinématographique d’un roman est toujours chose délicate. Pour mettre toutes ses chances de son côté, Gondry a bénéficié d’un budget de 20 millions d’euros, et a misé sur les effets spéciaux et un casting attirant aux yeux du spectateur. Cependant, la problématique reste de retranscrire les images de Boris Vian et son univers surréaliste particulier.
C’est une demi-réussite pour le réalisateur. Les effets spéciaux – très (trop!) présents durant le film – sont censés représenter le style de Boris Vian, mais très vite on assiste à une surenchère visuelle, qui, au lieu de donner une résonance poétique, perd le spectateur. Les jambes s’allongent, les chaussures marchent toutes seules, tout comme la sonnette de la maison, les anguilles sortent de la plomberie, les reflets de la lumière sont détachables, etc… Tous ces éléments privent la production de son essence émotionnelle et si certains sont nécessaire pour rester fidèle au roman (le pianocktail, un piano qui produit un cocktail en fonction de la mélodie jouée), d’autres sont superflus et ressemblent à une vaste entreprise de bricolage visuel.
Mais l’Ecume des jours, c’est avant tout beaucoup d’émotion, si on fait fi du surplus de trucages, les acteurs semblent avoir accordé leurs partitions. Romain Duris, nous montre un Colin timide et inquiet, Audrey Tautou, une Chloé insouciante et triste, Omar Sy, un cuisinier attentif et enjoué, et Gad Elmaleh, un Chick dérangé et sympathique. Cette palette de personnages évolue dans une véritable descente aux enfers, très bien reconstruite. En effet, les pièces diminuent de volume, les fenêtres ne laissent plus entrer la lumière, les images colorées deviennent noir et blanches, et l’apothéose finale reste très fidèle au livre. Il faut aussi souligner l’excellent travail des décorateurs et costumiers qui ont mis au monde un véritable univers à part entière plutôt conforme au roman.
Si l’Ecume des jours ne convainc pas entièrement, cela reste tout de même une adaptation insolite et respectueuse de l’oeuvre originale.