Basé sur le scénario original d'Aaron Guzikowski, ce dernier s'est retrouvé depuis 2009 dans la Black List Americaine (liste regroupant les meilleurs scénarios non produits pour différentes raisons). Par la suite, plusieurs réalisateurs ont été pressentis pour prendre les rênes du projet, dont Bryan Singer (compte tenu de la noirceur des personnages, il avait été tout naturellement désigné). Par la suite, différents acteurs se succèdent également pour les rôles principaux : Leonardo Dicaprio, Mark Walberg...(peu rancunier, il signera tout de même le film en tant que producteur). Ajouter à cela un synopsis traité à plusieurs reprises (La Rançon, The tortured, Mystic River,...) et vous comprendrez aisément que Prisoners (sortie en 2013) part avec un handicap certain.
Pour autant, force est de constater que le réalisateur : Denis Villeneuve s'en sort plutôt bien. Véritable démonstration de mise en scène, Villeneuve maitrise son art. Il n'y a qu'à voir l'utilisation de travellings lents et menaçants assimilé à une ombre planant sur la petite bourgade pour s'en rendre compte. A cela s'ajoute une ambiance glauque et poisseuse, une photographie sombre et décomplexée ainsi que des personnages torturés et parfaitement interprétés. C'est bien simple, Jake Gyllenhaal est incroyable dans le rôle de l'inspecteur apathique, traduisant ici l’impuissance d’une police démunie face aux tréfonds de l’âme humaine et non soutenu par une hiérarchie piégée par les règles à suivre, utilisant le whisky comme échappatoire. Hugh Jackman livre également une prestation très juste, à la fois touchante et violente, sans pour autant mettre en avant sa musculature naturelle (cette dernière étant volontairement dissimulée par une couche de vêtements omniprésentes).
Enfin, la durée du métrage surprend. En effet, au cours des 02h33 ont trouve parfois le temps long, l'enquête s'enlise, on cherche des indices. Puis dans la dernière partie, on souhaite soudainement que la durée se rallonge, car le temps s’accélère, les informations fusent, les suspects potentiels se multiplient. Denis Villeneuve lorgne alors vers le film de serial killer avec plus ou moins de brio. On pense soudainement à Seven ou encore à Zodiac avec lequel il partage de nombreux point commun
(le symbole du labyrinthe, le coté mystique du tueur...).
Sans dévoiler les rebondissements du métrage, le titre Prisoners (identique en version original) est parfaitement choisi. Ainsi, le prisonnier n'est pas seulement celui que l'on croit, les différents protagonistes se retrouvant prisonniers à tour de rôle de leur propre conviction.
En conclusion, Prisoners n'est pas le chef d’œuvre que l'on attendait. Cela étant dû à un scénario classique et brouillon. Cependant, force et de constater que Villeneuve maitrise sa mise en scène, que les acteurs sont convaincants et que l'ambiance pesante du métrage termine de produire l'effet escompté. On ressort de la projection avec un sentiment de malaise, on s’interroge sur la conclusion, le réalisateur nous laissant seul, prisonnier à notre tour de nos question qui resterons sans réponses.