"Biutiful" et sa fameuse erreur d’orthographe marque véritablement la patte "Inarritu", déjà entrevue dans ses trois premiers films et sa fameuse trilogie. Malgré une oeuvre que je pense un peu plus personnelle dans ce cas, on retrouve tout ce qui fait sa force : la proximité très forte avec les personnages au point d'avoir la sensation de presque s'immiscer en eux, une société hispanique en souffrance à l'image (trafic, vol, conditions de vie délétères), l'émotion palpable ressentie, le vide et la souffrance des personnages, leurs angoisses, leurs peines, ce à quoi ils se raccrochent... Ici, il est question du chemin de croix d'un individu à la personnalité détonante, qui semble atteint de toute la misère du monde dès que l'on croise son regard. Javier Bardem incarne donc ce fameux "Uxbal", et le moins que l'on puisse dire, c'est que son rôle semble le transcender tant il est impressionnant de vérité à l'écran. L'oeuvre tourne donc autour de son quotidien dans un quartier défavorisé de Barcelone, fait d'activités et de ressources pas vraiment légales mais aussi mystiques, pour au moins survivre à la misère de ce qui l'entoure, son logement miteux, son ex-femme bipolaire, ses problèmes de santé... Mais surtout, ce qui est mis en valeur chez lui, c'est sa générosité pour tous les personnages qui l'entourent, sa famille, ses enfants, ses proches amis... qui va donner un attachement spécial du spectateur pour lui, et générer le côté émotionnel au fur et à mesure. La dernière demi-heure est difficile, mais jamais le tout tombe dans le pathos. L'oeuvre n'est pas faite pour pleurer mais pour symboliser un ensemble d'actes, d'émotions, de choix résultant de la fin de vie. Mention spéciale aux enfants, attachants et bouleversants. Un grand moment de cinéma et d'humanité.