"La vie devant ses yeux" fait partie de ces films que l'on peut considérer comme étant partiellement inclassables, car même si son intrigue est indéniablement très étrange, ce récit ne constitue pas réellement un film fantastique au sens littéral du genre - car en effet, le phénomène psychologique "pré-mortem" constituant la trame de ce récit assez "tordu", serait à priori un phénomène mental rarissime mais bien réelle, correspondant à une forme de lecture accélérée de soi-même qui pourrait être corrélée à un processus d'écriture instantanée de la vie que l'on aurait souhaité obtenir, au moment exact où l'on perçoit comme inévitable, que son existence semble être sur le point de s'achever prématurément (!)...
- A mon sens, la puissance de ce film est, en premier lieu, fortement redevable à son intrigue très originale aboutissant à un twist final qui sait dérouter la plupart des spectateurs - car même les plus blasés et imaginatifs d'entre-eux, pourraient y trouver leur compte, à condition qu'ils jouent un minimum le jeu, en acceptant le principe de l'intrigue, consistant à faire se répéter, plusieurs fois au cours du film, l'un de ses segments cardinaux (!)... ^^
- En second lieu, l'intérêt de ce film est porté par sa mise en scène très réfléchie, qui arrive à faire ressentir au spectateur, aux détours de certains plans filmés, une sensation réellement déroutante, voire dérangeante, vis à vis de la manière dont on se positionne par rapport au double déroulement de la vie de l'héroïne du film, car son personnage est dédoublé et intégré simultanément à 2 plans de la réalité qui semblent se contredire entre-eux en permanence, - à cet effet, selon moi, ce tour de passe-passe dramaturgique ose s'aventurer à utiliser à bon escient, des images parfois poétiques, qui savent s'associer à certains moments, avec des gros plans fixant des objets appartenant à la vie ordinaire, ceci, comme pour faire semblant de nous caler au flux de la "véritable" réalité, alors que le but du récit consiste à nous perdre et à nous désorienter constamment (!), c'est très paradoxale de générer de telles sensations et émotions, en employant le mécanisme "psycho-narratif" contraire de ce qui serait attendu d'utiliser en temps normal (!)... ^^
- A cet égard, il faut autant saluer, une certaine audace que possède le cinéaste, ainsi que son savoir-faire pour tenter de retranscrire une intrigue qui peut être considérée comme un véritable casse-tête puisque son récit impose de délivrer parallèlement 2 récits éclatés, hachés et intercalés l'un en l'autre, en sachant que l'un des cours du temps montré au spectateur n'est que le fantasme existentiel d'une personne qui se sait être sur le point de disparaitre !...
- Pour ma part, j'ai trouvé ce procédé narratif comme relevant du pur tour de force scénaristique, d'autant que le livre, par sa complexité assez relative et par ses abstractions et ses lenteurs, était réputé pour être quasi intraduisible avec des images et du son !
- En troisième lieu, il me semble nécessaire de saluer la beauté de la partition musicale de ce film car certaines de ses notes arrivent à coller à l'action avec une réelle douceur et à véritablement décupler la puissance des images et de leurs montages, cela étant d'autant plus paradoxale que cette partition constitue le contraire d'une musique épique mais pourtant, ses mélodies arrivent à insuffler quelque chose de fort et de nature réellement mélancolique, dans l'esprit du spectateur, car cette mélancolie s'articule parfaitement autour du noyau dur dramaturgique de l'état "d'hallucination pré-mortem" qui est subit par la victime en devenir (!)... - donc, il me semble que l'on peu saluer le travail réalisé tout en finesse de James Horner sur cette partition.
- En dernier lieu, j'estime qu'il est obligatoire de saluer aussi le jeu, aussi nuancé que précis, de l'excellente actrice Evan Rachel Wood, d'autant que la fraicheur et la jeunesse de cette dernière, permettent d'imprimer davantage de force dramatique à ce récit de mort imminente - où se trouve mise en scène une "réalité parallèle pré-mortem". Il me semble utile de développer que ce film s'emploie à imposer au spectateur, une sorte de principe de résilience inversée, or, la beauté et la jeunesse de Evan Rachel Wood permettent d'augmenter considérablement la charge dramatique que fait ressentir l'intrigue, et à accentuer le drame final qui risque de s'abattre à chaque instant sur l'héroïne car le spectateur ne peut s'empêcher de penser en son fort intérieur, "quel dommage qu'une fille aussi jolie et pétillante puisse disparaitre au commencement de sa vie !".
- Pour finir, il me semble très utile de préciser que l'auteure qui a écrit le roman dont est adapté ce film, est la romancière Laura Kasischke, or, certains des récits qui sont imaginés par cette auteure, s'emploient quasi systématiquement à mettre en scène la mort d'un ou d'une innocente, qui semble être la victime piégée d'une suite de situations s'apparentant à un véritable piège, qui serait tendu et régis par les lois sadiques du hasard...
- En ce qui me concerne, j'ai beaucoup plus apprécié la version cinématographique de "La vie devant ses yeux", par rapport à sa version initiale, qui était sous la forme du roman écrit par Laura Kasischke, mais évidemment, que chacun se fasse son opinion à ce propos. ^^
- A priori, vous serez obligé de revoir une seconde fois ce film afin de pouvoir appréhender sous l'angle de vue adéquat, cette intrigue tortueuse, dont la conclusion très réussie aura su à priori vous dérouter totalement ! (pari tenue ? ^^)