La voix de Raymond Depardon nous guide dans ce paysage de campagne que nous sillonnons afin d’en savoir davantage sur le mode de vie, l’état d’esprit des autochtones, de ces agriculteurs condamnés à la solitude éternelle dans ces quatre coins de la France.
Ces gens de la terre qui apparaissent aussi forts que fragiles, conscients du devenir désastreux de leur métier, de leur passion plutôt puisque comme le dit cet agriculteur « On ne dit pas que l’on aime ce métier, on dit que l’on est passionné. »
C’est donc un constat très dur, mélancolique d’une culture sans avenir. Puisqu’il n’y a pas de relais. Entre crise de générations, problèmes financiers, problèmes divers liés aux troupeaux, à la terre, aux mauvaises retraites, c’est un peuple touché économiquement mais que la politique a laissé tomber. Réflexion aussi sur la mort, la succession, le désir de faire autre chose, les projets inaboutis… Quant aux personnages, Marcel, Raymond et consorts, même si l’on ne comprend pas toujours ce qu’ils disent, leur regard, leur tristesse, leur joie sont très touchantes et on prend plaisir d’être Depardon le temps d’un film car toutes ces questions nous aurions aussi aimés les poser. On approche tout cela en musique, sous le requiem de Fauré ou tout simplement avec la voix du cinéaste, des paysages magnifiquement filmés ; c’est un vrai caviar pour nos yeux ébahis de spectateur.
C’est un film sensible, bouleversant par sa simplicité, son honnêteté, et qui évite toute mièvrerie et misérabilisme qui nuiraient à l’œuvre. Un documentaire photographique, parce que les images sont sublimes, les cadrages très travaillés, qui aurait sans doute gagné (je parle pour moi là !) à être vu après les deux premiers, ce qui doit renforcer l’émotion, car les documentaires précédents sont partiellement évoqués. La fin est une des plus belle de l’année : poétique, grave et lumineuse.