Münich, Allemagne de l'Est, le 6 septembre 1972, site des Olympiades. Un commando palestinien, "Septembre Noir", pénètre le site et prend en otage onze athlètes israéliens. Après moultes négociations, le bilan est catastrophique à l'arrivée : presque tous les terroristes rués et aucun survivant parmi les athlètes. Le Monde est bouleversé, l'Etat d'Israël aussi : elle prend une décision terrible, celle de constituer un groupe de cinq hommes dans le but de retrouver et d'éliminer tous ceux qui ont un lien direct avec l'attentat.
Spielberg nous relate donc des faits véridiques embaumés de fiction : ces cinq hommes, l'opération "Colère de Dieu", non-préparés à la vraie guerre, qui sont lancés dans cette folle poursuite à la vengeance. Soyons franc : on ne peut s'empêcher de souffrir avec les athlètes israéliens lors de leur calvaire, on compatit et on souffre avec la nation juive qui pleure...les premières minutes de ''Munich'' font mal en nous mettant face à un cruel fait divers...et on ne peut que comprendre la réaction du premier ministre ; cependant, nous suivons le personnage d'Avner dans cette "quête", celui des cinq membres qui n'arrête pas de réfléchir à la situation alors qu'il est le leader du groupe. Spielberg se concentre sur cet homme dont les interrogations surviennent dès les premiers exécutions sur la légitimité de leurs actes. Au fur et à mesure qu'il s'enfonce dans les ténèbres de cette mission, Avner avance lui vers la lumière en comprenant que leur action est stupide : tuer un ennemi et 3-4 autres encore plus cruels prendront sa place. C'est le principe de l'Hydre de Lerne : on coupe une tête et deux nouvelles repoussent aussitôt. Et, à chaque mort, les ennemis engendrent un nouvel attentat dans une ambassade israélienne...ce petit jeu ne s'arrêtera donc jamais : la violence engendre la violence. Tout ceci n'est qu'une escalade, un cercle vicieux, une boucle sans fin. Voilà donc le thème principal de Munich et Spielberg, avec toute sa maestria, nous y convit par l'intermédiaire de son personnage principal...qui sera en quête d'une quelconque vérité qui fera de lui un homme conscient, non manipulé, et ce jusqu'à la dernière scène qui conclue magnifiquement les 2h40 qui ont précédé.
Côté réalisation, y'a rien à redire : tonton Steven est au summum de sont art. La reconstitution des années 70 est parfaite, on s'y croirait : objets, vêtements, voitures d'époque, archives télévisuelles...tout y est. De plus, nous pouvons admirer les plus belles capitales d'Europe (Rome, Paris, Londres, Athènes) que Spielberg ne se prive pas de nous montrer sous leur meilleur jour. Il est allé même jusqu'à filmer d'une façon réaliste pour l'époque : dans ''Munich'', pas de mouvements fantaisistes ou hyper rapides de la caméra, pas de contre-plongées vertigineuses ou autres "bullet-time". Non, tout est tourné d'une façon qui rappelle les films de l'époque (French Connection en tête). Spielberg a même poussé le réalisme lors des scènes d'action : les coups de feu sont vifs mais étouffés et les explosions ont un son très sourd.
Je tiens à tirer mon chapeau au casting : ils sont tous impeccables ! Les cinq membres de "Colère de Dieu" rivalisent de charisme et, même si on se concentre avant tout sur Avner, chacun d'entre eux à droits à ses plans et monologues. Je tiens aussi à noter que les deux français sont nickels : que ce soit Louis (Mathieu Amalric parfait dans son rôle d'indic) ou son père (Michael Lonsdale, toujours aussi charismatique malgré le poids des années). Mentions spéciales : une pour notre frenchie Mathieu Kassovitz dans le rôle de Robert, le fabriquant de jouets, qui nous prouve encore une fois qu'il est aussi bon acteur que réalisateur ; et une pour Eric Bana qui nous livre ici sans conteste LE rôle de sa carrière (au moins pour l'instant). Il campe un Avner qui finalement pourraît être Monsieur Tout-Le-Monde, n'importe lequel d'entre nous. L'avancement de sa mission correspond à l'avancement de son éveil face à la légitimité de son action; une quête de vérité, mais aussi une quête de rédemption, regardez l'affiche du film : Eric Bana est assis sur une chaise, à contre jour, tenant dans ses mains un révolver et est devant une fenêtre totalement blanche qui l'illumine...on dirait vraiment un ange déchu cherchant à se repentir.
Enfin côté musique, je serais bref tant John Williams nous livre encore un score exceptionnel dont le plus morceau, je trouve, est celui du staff final.
Bilan, Steven Spielberg nous livre un superbe film teinté de tragédie et d'optimisme à la fois. Un nouveau chef-d’œuvre à son tableau de chasse; nous prouvant encore une fois qu'il est bien l'un des meilleurs réalisateurs de notre époque.