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    Interview : "Dragon Rouge"

    Hannibal Lecter, Thomas Harris, le film de Michael Mann. Retrouvez l'interview du réalisateur Brett Ratner, dont le "Dragon Rouge" est lâché ce 30 octobre.

    AlloCiné : Le livre "Dragon Rouge" avait déjà été adapté au cinéma dans "Sixième Sens". Pourquoi en avoir réalisé une deuxième version ?

    Brett Ratner : J'ai lu le script de Ted Tally, qui était totalement différent de celui du Sixième Sens, plus proche du livre original de Thomas Harris. Le film de Michael Mann n'avait pas non plus Anthony Hopkins et je pense que le personnage d'Hannibal lui appartient désormais. J'ai donc pensé qu'il serait intéressant de compléter la trilogie du professeur Lecter, en commençant par son arrestation, ce qui n'était pas montré dans Le Sixième Sens.

    Ne craignez-vous pas que le public compare votre film avec celui de Michael Mann ?

    Mais personne n'a vu Le Sixième Sens ! Tout le monde me pose la même question, mais je ne me la suis jamais vraiment posée moi-même. J'ai apprécié Le Sixième Sens mais Dragon Rouge est un film différent, plus inspiré du Silence des agneaux. J'ai voulu lui donner une dimension "hitchcockienne", plus psychologique, qui faisait appel à l'imagination du spectateur. Si vous regardez mon film en pensant à celui de Michael Mann, quelque chose cloche chez vous. Ceci dit, lorsque Dragon Rouge est sorti aux Etats-Unis, Michael Mann m'a envoyé un mot qui disait : "Super critiques ! Félicitations. Michael".

    Vous partagez tout de même le même producteur, Dino De Laurentiis, et le même directeur de la photographie, Dante Spinotti...

    Dino De Laurentiis n'intervient que très peu dans le travail des réalisateurs qu'il engage. Ce qui explique qu'il a produit beaucoup de mauvais films, mais aussi beaucoup de bons. Quant à Dante Spinotti, j'avais déjà collaboré avec lui sur Family man. Je lui ai donc envoyé le script de Dragon Rouge, en supposant qu'il refuserait car il avait déjà travaillé sur Le Sixième Sens. Quand il m'a répondu qu'il était partant et je lui ai demandé : "Mais pourquoi donc ? Tu l'as déjà fait une fois". Il m'a rétorqué que Monet avait bien peint la Cathédrale plus de trente fois !

    Vous venez de la comédie. N'était-ce pas trop difficile de basculer dans le thriller ?

    Vous savez, au début, je n'ai pas compris pourquoi les producteurs de Dragon Rouge m'avaient envoyé le script. J'étais surpris, je leurs ai dit que je réalisais pas de thriller. Mais j'ai adoré le script, qui contenait de l'émotion, du coeur, des scènes poignantes. Je pense que je peux m'adapter au scénario qu'on me fournit. Je n'ai pas de style très défini, comme Martin Scorsese, Joen et Ethan Coen ou Spike Lee, que j'admire tous, mais je suis présent dans chacun de mes films à travers l'humour et l'énergie que j'essaye de dégager. De nos jours, les réalisateurs sont souvent enfermés dans un seul genre. Mais il y a longtemps, les metteurs en scène passaient de la comédie au drame puis au western et à la comédie musicale. Après avoir réalisé les deux Rush hour, Family man et Dragon Rouge, je crois que je pourrais désormais m'adapter à n'importe quel genre.

    Comment prendre la succession de réalisateurs tels que Michael Mann, Jonathan Demme et Ridley Scott ?

    En fait, j'avais derrière moi trois films du même genre, mais totalement différents les uns des autres. Il fallait que je me décide entre réaliser un long métrage très stylisé comme celui de Michael Mann, très sanglant comme celui de Ridley Scott, ou plus psychologique comme celui de Jonathan Demme. Je me suis plus orienté vers le style du Silence des agneaux, vers cette dimension psychologique et "hitchcockienne" dont je parlais tout à l'heure. Je voulais que Dragon Rouge puisse persister dans le temps. Aujourd'hui Le Silence des agneaux est toujours un bon film. Je ne suis pas certain que l'on dira la même chose d'Hannibal, qu'on l'ait apprécié ou non, dans vingt ans, car c'est un film très stylisé. J'espère que mon film est très classique et qu'il pourra durer, justement parce qu'il n'est pas trop stylisé.

    Comment Anthony Hopkins a-t-il abordé son personnage, qui est rajeuni par rapport au "Silence des agneaux" et à "Hannibal" ?

    Il ne voulait pas rentrer dans le côté baroque d'Hannibal. Nous avons discuté du script et Anthony Hopkins voulait se montrer plus dangereux. Avec Clarisse Starling, Hannibal peut être gentil, charmant. Il ne peut pas se comporter de la sorte avec Will Graham, car il est en colère contre celui qui l'a arrêté. Nous avons décidé de creuser cette voie.

    Après "Hannibal" de Ridley Scott, votre film s'est bien comporté au box-office américain. Comment expliquez-vous la popularité d'Hannibal Lecter ?

    Je n'ai jamais étudié les théories de Freud ou de Young. Je pense que les spectateurs sont fascinés par le côté sombre, par le Mal, ce que représente Hannibal car il n'a aucune conscience. Si je fais du mal à quelqu'un, je m'en sens responsable. Hannibal, lui, s'en moque.

    Propos recueillis par Thomas Colpaert

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