De quoi ça parle ?
Gustavo, mari et père de famille " parfait ", devait ce jour-là vivre son heure de gloire professionnelle. Mais cette journée tant attendue se transforme en cauchemar : il est placé en garde à vue pour tentative d’enlèvement sur mineure et homicide volontaire. Gustavo est-il coupable ? Claire, la victime présumée, poste son histoire sur les réseaux sociaux. Gustavo et sa famille entrent dans la spirale de la vindicte populaire. Est-il possible d’en sortir et dans quel état ? La justice se heurte au tribunal de l’opinion et à la rumeur…
Jugé sans justice, lundi 11 octobre à 21h05 sur France 2
C'est avec qui ?
Librement adapté du roman Est-ce ainsi que les hommes jugent ? de Mathieu Ménégaux dont il cosigne le scénario, le téléfilm est écrit et réalisé par Lou Jeunet (Curiosa) et met en scène Yannick Choirat (Laëtitia) et Ophelia Kolb (Dix pour cent) dans le rôle d'un couple persécuté par la justice, face à Emmanuel Salinger (Je te promets), Anne Benoit (Lupin) et les jeunes Justine Lacroix (C'est ça l'amour) et Mathieu Capella (révélé dans Deux Fils).
Ça vaut le coup d'oeil ?
Drame sociétal, Jugé sans justice décrypte l'enfer de la machine judiciaire lorsqu'elle s'acharne à prouver la culpabilité d'un homme victime de mauvaises circonstances, lorsque sa voiture s'avère être similaire à celle d'un homme qui a fauché le père de Claire (Justine Lacroix) , une adolescente qu'il tentait d'enlever sur un parking de supermarché trois ans auparavant.
Quand la justice s'acharne
Intrusion sans ménagements de la police dans son domicile, maltraitances psychologiques pour le pousser à avouer : le commandant Delfis (Emmanuel Salinger) redouble de perversité envers Gustavo (Yann Choirat), poussé par l'intime conviction de sa culpabilité lorsque l'adolescente croit reconnaître en lui l'assassin de son père.
D'entrée de jeu, l'unitaire insiste sur les pratiques déviantes de la police pour faire plier Gustavo, au détriment des preuves inexistantes à son encontre et des conséquences de son arrestation sur son entourage. Car si le commissaire s'avère déterminé à rendre justice à Claire, désormais orpheline, ses méthodes et son excès de zèle dépassent le simple exercice de la loi. Mais alors que la justice semble donner un moment de répit à l'accusé faute de preuves à charge, l'identité de Gustavo fuite sur internet et tout bascule.
Haine virtuelle
C'est là que l'unitaire perd en intensité après une première partie nerveuse sur l'engrenage infernal se refermant sur le héros victime d'une erreur judiciaire, et un ton très critique envers la police. Lorsque les réseaux sociaux s'en mêlent, tout s'accélère : la famille de Gustavo se retrouve harcelée, ses employeurs craignent les retombées pour leur image et demandent sa mise à pied... Et le public veut rendre justice à Claire par tous les moyens possibles, au point de compromettre l'enquête.
Efficace dans sa narration, le propos du téléfilm s'égare à ce moment-là dans une analyse trop simpliste de la cancel culture, réduisant la jeune victime à une adolescente matérialiste dépourvue de discernement, prête à jeter en pâture sur la place publique un homme innocent. La place du traitement médiatique de l'enquête se révèle trop vite expédiée, ne donnant pas la pleine mesure de l'enfer que les personnages traversent et de la mécanique implacable de la viralité des propos sur le web.
Bien que la conclusion douce-amère du film vienne sauver le tout, et en dépit d'un casting sans fausses notes, on reste sur notre faim quant à l'approche de cette thématique contemporaine de la haine en ligne pourtant riche de complexité, comme si le sujet n'avait été qu'effleuré à l'issue des ces 1h30.
A la suite du téléfilm en deuxième partie de soirée, France 2 diffuse un documentaire intitulé "Les réseaux de la colère", qui explore la responsabilité des réseaux sociaux dans le développement croissant des comportements haineux sur Internet; l'occasion de pousser un peu plus loin la réflexion sur le sujet.