Le 5 février 2014, Mathias Malzieu fait officiellement ses débuts de réalisateur lorsque sort dans les salles françaises Jack et la mécanique du cœur. Un long métrage animé qu'il a mis en scène avec Stéphane Berla, qui rappelle parfois l'univers de Tim Burton avec l'usage du stop-motion ou son héros imparfait doté d'une horloge en guise de cœur, et dont l'origine remonte à la décennie précédente : à l'automne 2007 plus précisément, lorsque sortent, le 24 octobre et le 5 novembre respectivement, le livre "La Mécanique du cœur" et l'album du même nom qu'il a signé avec son groupe Dionysos, dont il est le leader, et qui se présente comme la bande-son du roman, avec lequel il prend néanmoins quelques petites libertés.
Sur papier, CD ou à l'écran, l'histoire reste la même : né en Écosse le jour le plus froid du monde, le 16 avril 1874 très exactement, Jack vient au monde avec un cœur gelé. Mais la sage-femme qui l'a fait naître parvient à user de ses dons de sorcellerie pour remplacer son palpitant par une horloge, avec comme conditions de devoir la remonter quatre fois par jour, et de ne jamais céder à la colère, ni à l'amour. Ce qu'une rencontre avec Miss Acacia, chanteuse de rue croisée à Grenade, va bien évidemment chambouler et le plongeant dans une aventure mouvementée. Resté pendant plus de vingt semaines dans le classement des livres les plus vendus en France au moment de sa sortie, le roman possédait déjà un véritable potentiel cinématographique que l'album de Dionysos n'a fait qu'amplifier, avec ses sonorités qui convoquent notamment l'esprit du western.
Dans la lignée de "Monsters in Love", précédent album du groupe sorti en août 2005 et dont celui-ci peut faire office de prequel grâce aux deux personnages qu'ils ont en commun, "La Mécanique du cœur" se présente comme un conte musical façon "Émilie Jolie", où chaque titre illustre la rencontre entre le héros et un protagoniste différent, et permet à Dionysos de convoquer une prestigieuse liste de guests : Olivia Ruiz prête sa voix à Miss Acacia, Arthur H joue Arthur, Jean Rochefort Georges Méliès, Alain Bashung Jack l'Éventreur, Grand Corps Malade est un certain Joe, et Eric Cantona incarne Giant Jack.
A l'exception de l'ancien footballeur, tous reprennent leurs rôles respectifs dans l'adaptation cinématographique, y compris le regretté Alain Bashung, mort en 2009, mais dont les phrases enregistrées pour les besoin de l'album ont été réutilisées. Et tout ce beau monde entoure Mathias Malzieu, interprète de Jack, héros qui lui ressemble physiquement et va jusqu'à porter le même costume (noir avec une longue veste en queue de pie, chemise rouge et cravate noire) que le chanteur lors de certains des concerts de Dionysos. Un groupe qu'il n'est pas nécessaire de connaître sur le bout des doigts pour pouvoir apprécier Jack et la mécanique du cœur. Mais nul doute que les fans remarqueront quelques détails, comme lorsqu'un personnage chante une chanson appelée "La Métamorphose de Mister Chat", issue de "Monsters in Love". Et que découvrir ce joli film d'animation pourra donner envie aux autres de se plonger dans ses deux sources d'inspiration.
Notons que le second long métrage réalisé par Mathias Malzieu est sorti en mars 2020 dans les salles françaises, juste avant le confinement : il s'agit d'Une sirène à Paris, adaptation en prises de vues réelles du roman homonyme qu'il avait publié en 2019, et dont les rôles principaux sont tenus par Nicolas Duvauchelle et Marilyn Lima. Le fantastique y occupe encore une grande place, mais cette fois-ci, l'album de Dionysos qui y est lié, "Surprisier", a débarqué dans les bacs quelques jours seulement avant le film.