De quoi ça parle ?
Dans un village norvégien pollué et troublé par la fonte des glaciers, la fin des temps semble bien réelle. Mais alors que l'avenir de l'humanité pourrait bien reposer sur un adolescent ayant mystérieusement hérité de facultés surhumaines, le Jour du jugement dernier sera-t-il précipité par l'urgence climatique ou sera-t-il la conséquence d'un nouvel affrontement entre dieux et géants ?
Ragnarök, créée par Adam Price (Borgen, Au nom du père).
Disponible depuis le 31 janvier sur Netflix. 6 épisodes vus sur 6.
À quoi ça ressemble ?
Ça vaut le coup d'oeil ?
Après Borgen, considérée comme l'une des meilleures fictions politiques jamais produites, et Au nom du père, qui revisitait le drame familial en tissant une réflexion bouleversante sur la religion et la foi, le scénariste et producteur danois Adam Price s'attaque au genre de la série ado avec Ragnarök. Un titre qui fait référence à la fin du monde dans la mythologie nordique et qui dira forcément quelque chose aux fans de la franchise cinématographique Thor. Mais s'il est bien question, caché quelque part sous une couche de problèmes adolescents et de dérèglements environnementaux, de dieux et d'affrontements entre créatures ancestrales, les amateurs de Marvel et de récits fantastiques regorgeant de scènes d'action et d'effets spéciaux pourraient bien être déçus par cette nouvelle série originale Netflix norvégienne. Parce que, avant tout, Ragnarök est un drame intimiste sur l'état de la planète Terre et sur l'urgence qu'il y a à la sauver.
Tout commence de manière plutôt intrigante lorsque le jeune Magne s'installe, avec son frère Laurits et sa mère Turid, dans la petite ville fictive d'Edda et est le témoin de changements climatiques soudain. S'en suit pour Magne une rencontre des plus étranges avec une vieille dame prophétique et la manifestation de superpouvoirs (liés à Thor ?) qu'il ne soupçonnait pas. On se croirait face à une origin story digne de celle de Spider-Man (les lunettes de l'ado devenues obselètes étant un clin d'oeil très certainement assumé). Mais le propos mythique et fantastique de la série passe rapidement au second plan, laissant alors apparaître le vrai sujet de Ragnarök : l'urgence climatique. Aux intrigues lycéennes de base, souvent vues et revues, qui jalonnent le parcours initiatique de Magne, qui ignore encore qu'il a le poids du monde sur ses épaules, se superpose en effet un vrai propos environnemental qui fait de la série d'Adam Price une fable écologique engagée à destination de la jeune génération. L'un des personnages, Isolde, militante écolo qui alerte ses camarades sur les dangers du plastique et sur la pollution de l'eau, et répand son inquiétude sur YouTube, fait d'ailleurs penser à une Greta Thunberg en puissance et ce n'est sans doute pas pour rien que cette dernière est mentionnée au détour d'une séquence. Et c'est justement un événement lié à Isolde qui va précipiter l'action de la série dans une enquête menée par Magne qui pourrait bien révéler aux yeux de tous une catastrophe environnementale de grande échelle.
Lente à se mettre en place et à faire bouger les pions de son intrigue finalement assez peu fournie en rebondissements, cette première saison en six épisodes de Ragnarök ressemble à une longue introduction avant une saison 2, même si certains éléments finissent par trouver une conclusion assez satisfaisante au terme d'un final qu'on aurait aimé un peu plus épique. Mais grâce à une BO soignée, une esthétique qui rappelle The Rain, et des personnages attachants globalement très bien interprétés (mention spéciale à Jonas Strand Gravli qui survole le reste du casting dans la peau d'un Lorits qu'on aurait aimé plus présent et qui rappelle le Loki de Tom Hiddleston par certains traits), on se prend à se laisser emporter sans déplaisir dans cette série ado qui sort des sentiers battus en adoptant une approche politique et écologique inédite. Au sein de laquelle un nouvel affrontement attendu entre dieux et géants, ennemis ancestraux toujours présents sur Terre dans le plus grand secret, fait finalement office de métaphore plus ou moins fine à la lutte que mènent les militants contre les industriels qui ignorent et, pire, participent même, à la dégradation et à la pollution de la planète. Malgré un manque d'action et dose trop sporadique de fantastique, Ragnarök trouve le ton juste pour parler à ceux qui aujourd'hui sont les plus concernés et les plus impliqués dans le combat écologique - les jeunes - et nous assène un constat alarmant plus que jamais d'actualité : si fin du monde il y a un jour, le "Ragnarök" sera cette fois-ci écologique et Thor ne sera pas là pour nous sauver.